L’informel, qui revient en force dans l’économie nationale, n’étonne nullement Billel Aouali, expert en économie, qui attribue cette situation, au fait que l’informel agit sans facture et de gré à gré.
Eco Times : La pandémie du coronavirus a mis à mal notre économie. L‘Etat a distribué des aides pour soutenir, un tant soit peu, notre économie mais, apparemment, sans grands résultats. Comment l’expliquez-vous ?
Billel Aouali : A mon sens, les aides de l’Etat ont été un appoint utile dans les activités de notre pays. Ceci étant, elles sont une bonne chose dans le sens où il n’y a pas eu de paralysie de l’appareil productif. Pour moi, la crise a été bien gérée, et contrairement aux prédictions de l’OMC et autres instances mondiales, il n’ya pas eu de crise majeure, à part la sanitaire. Il n’y a eu aucune rupture de stocks, et le comportement civique des nos concitoyens, qui ne se sont pas rués pour constituer des stocks de réserve, a permis un approvisionnement régulier du marché et, donc, pas de pénurie surtout.
Il faut reconnaître que l’effort de l’Etat a été déterminant, car il a agi sur ses fonds de réserves. Sans cela, la crise aurait été tout autre. Certes, certaines entreprises ont fermé, mais sans les aides, cela aurait encore été plus catastrophique.
Nos nationaux se sont sentis rassurés, puisque tout était disponible comme avant la crise, et même si certains produits se sont un peu envolés, il n’en reste pas moins, qu’ils étaient disponibles. Cela rassure la population en comparaison avec d’autres pays frontaliers.
De plus, les importations étant en baisse, la production nationale a pu se frayer librement un chemin dans le marché national.
Ne serait-ce pas une forme de protectionnisme ?
Sur la forme peut-être, mais sur le fond absolument pas. Sur le fond, c’est une politique de préférence nationale, que tout le monde pratique, et même les Etats-Unis, qui sont le chantre du libéralisme, ne se privent pas, par le truchement de taxes et autres dispositifs, de favoriser leurs productions. Alors, pourquoi pas nous ?
Alors que nous ne sommes même pas encore sortis de la crise, l’informel revient en force. Selon vous, pourquoi ?
La grande erreur de l’Etat est d’avoir toléré ce marché parallèle, et de ne pas l’avoir combattu efficacement. Par fait d’accointance, de laxisme ou corruption, ceci est un autre débat.
Toujours est-il, que toute la puissance publique ne peut rien contre le marché de gré à gré.
Tout l’informel repose sur ce paradigme. Il n’a pas d’autres déclinaisons. Tout se fait sur la foi de la parole et le paiement se fait, souvent, dans des sacs poubelles et c’est connu.
Comment voulez-vous lutter contre cela ? Impossible. Et cela est d’autant plus catastrophique que les pouvoirs publics, qui n’ont pas de pouvoir de contrôle, puisque les transactions se font sans facture, donc pas de rentrée d’impôts.
Sans facturation, c’est la porte ouverte à toute forme de spéculation. Tant que des mesures strictes ne sont pas prises pour couler le marché informel, celui-ci a encore de beaux jours devant lui.
Propos recueillis par Réda Hadi