L’affaire Khalifa, dont le procès s’est ouvert dimanche dernier, et se poursuivant encore aujourd’hui (mercredi 11 novembre 2020), au Tribunal criminel près la Cour de justice de Blida, promet de nouvelles révélations.
Par Nadjib K.
Avec l’audition des parties civiles, le réquisitoire du Procureur général, et les plaidoiries de la défense des 12 mis en cause, dont l’accusé principal, Abdelmoumène Khalifa, ancien P-dg du Groupe Khalifa, la cour de justice de Blida, poursuit l’un des procès qui a longtemps défrayé la chronique. Face à la négation des faits qui sont reprochés aux coaccusés, la présidente du tribunal, Nadia Hamidi, poursuit les auditions.
Abdelmoumène Khalifa qui a nié, dans ce cadre, toutes ces charges retenues contre lui, a affirmé, pour rappel, avoir été victime «d’un complot avec la complicité de l’ancien système». Une manière pour lui d’échapper au réquisitoire qui lui est adressé, et le prenant pour responsable du scandale qui a émaillé le parcours de son entreprise.
Ainsi, rapporte l’agence officielle APS, plusieurs accusés auditionnés sont revenus sur leurs déclarations faites auparavant, lesquelles condamnent le principal accusé dans l’affaire Khalifa, au sujet notamment du retrait de fonds sans titres réguliers. Il est également à noter que le principal accusé, Abdelmoumène Khalifa (actuellement en détention), de même que d’autres accusés non arrêtés, sont poursuivis pour les chefs d’inculpation de «constitution d’association de malfaiteurs», «falsification de documents officiels et usage de faux», «vol en réunion, escroquerie, abus de confiance et corruption», «falsification de documents bancaires», et «banqueroute frauduleuse». Dimanche dernier (8 novembre 2020), l’affaire est présentée devant le juge, pour la troisième fois, suite à la décision de la Cour suprême d’accepter le pourvoi en cassation du dernier verdict prononcé par la Cour d’appel en 2015. Lors de ce procès, Khalifa avait écopé de 18 ans de prison ferme et de la confiscation de l’ensemble de ses biens.
Le Golden Boy tombé en disgrâce
Pour rappel, Abdelmoumène Khalifa qui défrayait la chronique du monde des affaires en début des années 2000, quelques temps seulement après l’arrivée au pouvoir d’Abdelaziz Bouteflika, en s’imposant comme le Golden Boy qui se trouva en un temps record, à la tête d’un empire financier constitués de la compagnie aérienne Khalifa Airways, Khalifa Bank, Khalifa TV… se verra tomber en disgrâce dès la fin de l’année 2002 avec la faillite déclarée de sa banque privée Khalifa Bank.
Le malheur n’étant pas arrivé seul, la compagnie Khalifa Airways, la branche pharmaceutique du groupe et le groupe médias, emboitent le pas à la banque, et envoient quelques 20.000 salariés en Algérie et ailleurs, au chômage.
Le groupe fait faillite, mais la suite n’était pas aussi sans surprise, puisque selon les conclusions retenues des différents procès ouverts à cet effet, la liquidation a été pour le moins chaotique, avec notamment de nombreux actifs disparus. Une sorte hold-up a été opéré, et c’est ainsi que des avions ont tout bonnement disparu du décompte, au même titre que les voitures appartenant à l’agence de location Khalifa. Les biens à l’étranger bradés, et des sommes d’argents conséquentes auraient disparu de la caisse principale de la Banque Khalifa. A l’époque, les pertes pour l’Etat et les particuliers étaient estimées entre 1,5 et 5 milliards de dollars.
Ayant fui à Londres où il s’est réfugié dès 2003, Abdelmoumène Khalifa a fini par se faire écrouer en 2007 au Royaume-Uni, avant qu’il ne soit extradé fin 2013, après épuisement de tous les recours. C’est en 2015 que le tribunal criminel près la Cour de Blida le condamne à 18 ans de prison ferme, assortie d’une amende d’un million de DA avec confiscation de l’ensemble de ses biens.
Le jeu de cache-cache d’Abdelmoumène Khalifa
Lors du procès en cours, Kalifa qui a, maintes fois promis des révélations, se complaît dans une posture de victime, en se défaussant tantôt sur ses collaborateurs et subordonnés et tantôt sur «l’ancien système» qui aurait exercé des pressions sur lui. Fidel à son jeu de cache-cache, Abdelmoumène Khalifa n’a pas dérogé à la règle depuis dimanche dernier, lui qui a nié toute difficulté financière, à l’exception d’un trou d’un montant de 10.000 dinars (65 euros). Selon des déclarations qu’il a faites au juge, «toutes les agences de la banque étaient solvables à mon départ du pays.», ajoutant que «Les fonds de ces banques ont été pillés dès que j’ai quitté le pays, avec la complicité de l’ancien système». Affaire à suivre…
N. K.