Après avoir finalisé le projet de loi régissant le Code de l’investissement, le gouvernement s’attaque au dossier du foncier industriel. Un avant projet de loi, modifiant et complétant l’Ordonnance n 08-04 du 01/09/2008 fixant les conditions et modalités de concession des terrains relevant du domaine privé de l’Etat destinés à la réalisation des projets d’investissement, vient d’être, en effet, adopté, lors de la réunion, avant-hier, du gouvernement. Il sera soumis aux prochain Conseils des ministres.
Par Akrem R.
En effet, cet avant projet de loi propose la création de quatre agences nationales chargées d’octroi du foncier destiné à l’investissement, indiquent les services du Premier ministre dans un communiqué.
Cette révision, qui s’inscrit «dans le cadre de la mise en œuvre des directives de Monsieur le Président de la République vise à prendre en charge les insuffisances et les dysfonctionnements constatés jusque-là dans l’octroi et la gestion du foncier économique, mais aussi, à favoriser la transparence et la performance économique à travers l’octroi des concessions du foncier pour la réalisation des projets d’investissements créateurs de richesses et d’emplois», explique la même source.
Ainsi, cet avant projet de Loi vise à réviser et à harmoniser les modalités d’octroi des concessions du foncier économique en vue d’instaurer une transparence et une efficacité dans le traitement des dossiers, un suivi et un accompagnement des investisseurs et, partant, de l’amélioration du climat d’investissement par la mise en confiance de porteurs de projets. A ce titre, souligne le texte, «la principale réforme proposée porte sur la création de quatre agences nationales indépendantes, dotées de la personnalité juridique et de l’autonomie financière, chargées d’exercer, pour le compte de l’Etat, les missions d’octroi du foncier économique destiné à l’investissement et du suivi de l’exécution des projets réalisés dans ce cadre».
Dans ce cadre, l’expert en économie, Ishak Kherchi, a qualifié cette démarche de continuité de l’effort de l’Etat pour relancer l’investissement, notamment, avec la promulgation du projet de la nouvelle loi qui sera débattue, incessamment, au Parlement. Notre interlocuteur a estimé que les quatre agences seront chargées de la gestion du foncier industriel agricole, services et touristique. La réussite de ce nouveau mécanisme de gestion du foncier est conditionnée par la numérisation des leurs services et à ce que tout le foncier soit inscrit sur une plateforme numérique au niveau des ces agences. C’est le moyen qui garantira la transparence et en finira avec les pratiques anciennes, dont l’octroi du foncier d’une manière anarchique et opaque.
L’expert a également préconisé l’organisation de conférences nationales similaires à celle de l’industrie. « L’organisation de conférences nationales pour la relance de l’agriculture et du tourisme permettra aux pouvoirs publics d’avoir une visibilité claire sur le foncier exploité et inexploité. Des mesures doivent être prises pour la levée du gel sur les projets d’investissements en suspens, avec l’intervention du médiateur de la République, pour passer ensuite à l’étape de la récupération du foncier inexploité», souligne-t-il, tout en recommandant de connecter ces agences au guichet unique. « Nous devons aller rapidement vers l’organisation de conférences nationales de relance pour la récupération des terrains exploités et d’effectuer des mises à jour de la situation du foncier en question», conclut-il.
A. R.
Hamza Boughadi, expert en économie : «Il faut instaurer un outil de suivi »
L’expert en économie, Hamza Boughadi a appelé à l’instauration d’un outil de veille et de suivi dans l’octroi du foncier économique (industriel, agricole, touristique et aquaculture). D’ailleurs, ce manque de suivi dans les années précédentes est à l’origine des dépassements et de l’anarchie ayant emmaillé l’investissement et, surtout, l’octroi du foncier industriel.
Des milliers d’hectares ont été octroyés à des investisseurs, sans être toutefois exploités. Une situation qui a noirci le climat des affaires en Algérie, d’une manière générale. Les vrais investisseurs trouvaient d’énormes difficultés dans l’accès au foncier. La création de quatre agences pour la gestion du foncier est une bonne chose, mais qui doit être suivie par un contrôle rigoureux et par l’application de la loi, estimera Hamza Boughadi.
« Le problème se pose au niveau du suivi. Sinon comment expliquera-t-on que l’on accorde du foncier à un investisseur, 3 ans après, sans aucun contrôle et suivi ? La loi est très claire, autant l’actuelle que l’ancienne, pourtant : si un bénéficiaire du foncier, dans le cadre d’une concession ne concrétise pas son projet au bout de deux années, il doit être, tout simplement, exproprié», explique-t-il.
Pour cet expert, «il ne faut pas avoir peur dans l’acte d’octroi du foncier. Il faut répondre à la demande des investisseurs, tout en instaurant un suivi par un contrôle rigoureux».
Ainsi, l’Etat est appelé à assumer ses responsabilités en matière d’aménagement du foncier, en le fiabilisant pour être exploitable (raccordement en électricité, travaux VRD, eau, gaz, etc.) « Nous avons constaté beaucoup de problèmes du genre. Ceci dit, certes, il y’en a qui ont pris des terrains sans les exploiter, mais il y a également, de l’autre côté, des gens honnête. Ils ont réalisé des usines à des milliers de DA, non encore en exploitation pour divers problèmes. À cet effet, il faut vraiment designer les responsabilités et instaurer un outil de suivi. Comme cela, tout le monde sera gagnant», détaille-t-il.
Questionné sur la relation entre ces agences et le guichet unique, l’expert a plaidé pour l’octroi de dérogations nécessaires pour effectuer son travail normalement et accélérer les opérations de traitement de demandes du foncier. En termes clairs, l’investisseur doit, simplement, se concentrer sur son travail de réaliser son projet. Quant au guichet unique, il doit être lié directement à ces agences pour une meilleure coordination.
Propos recueillis Akrem R.