Le ministère de l’Agriculture se prépare déjà pour la prochaine campagne céréaliculture, Labours-semailles. Six groupes de travail ont été désignés pour l’élaboration de la nouvelle carte de production, notamment, en blé dur ainsi que le nouveau dispositif de soutien et d’accompagnement des producteurs.
Par Akrem R.
Ces groupes ont été désignés lors d’une réunion de travail, tenue la semaine dernière au siège du ministère, en présence des cadres de ce département, ceux des instituts techniques, des membres du Conseil national interprofessionnel de la filière céréales, des multiplicateurs de semences, ainsi que des spécialistes en la matière.
En effet, cette réunion s’inscrit directement dans la mise en application des orientations du président de la République, ainsi que la mise en œuvre de la feuille de route du secteur pour la période 2020-2024, a indiqué un communiqué du ministère de l’Agriculture. A travers ces mesures, les pouvoirs publics veulent augmenter la production locale en ces produits stratégiques et réduire, à la fois, la facture des importations qui reste jusqu’à présent «salée».
De grosse sommes sont consacrées, annuellement, pour s’approvisionner en blé tendre et dur. La flambée des prix sur le marché mondial et les changements géopolitiques, suite à la pandémie du coronavirus, sont autant de problématiques à prendre au sérieux. Sans le développement d’une agriculture planifiée et moderne, notre sécurité alimentaire sera sans doute menacée.
À cet effet, Laâla Boukhalfa, expert dans le domaine agricole, préconise de revoir notre stratégie, en donnant plus d’importance aux compétences locales. Le problème de la céréaliculture dans notre pays est d’ordre technique. « On doit concentrer nos efforts sur la reproduction des variétés de semences algériennes. Dans le passé, l’Algérie était le grenier de Rome en matière de produits agricoles, notamment, en blé. Mais depuis que l’Algérie recoure à l’importation de semences de l’étranger, notre production locale et rendement par hectare ont connu une chute libre. Actuellement, nous dépendons, grandement, de l’étranger pour garantir l’alimentation des Algériens», a-t-il souligné dans une déclaration à notre journal. M. Boukhalfa a affirmé que l’Algérie est un territoire par excellence pour le développement de la céréaliculture, en indiquant que tous les territoires de 0 à 3000 m d’attitude sur la mer, sont fertiles pour le blé. L’expert agricole a, dans ce cadre, recommandé de récupérer les semences spécifiques à l’Algérie. Pour lui, il est nécessaire d’effectuer un diagnostic de la filière céréaliculture dans notre pays pendant le colonialisme, postindépendance et durant les années 70. « Il faut revenir aux fiches techniques de ces années pour reproduire ces semences ayant donné des résultats positifs durant ces périodes», a-t-il affirmé, en appelant à la renaissance des semences de Oued Zenata et des hauts plateaux.
Augmenter les rendements de 30 à 40%
A cela s’ajoute, la nécessité de respecter l’itinéraire technique de la culture du blé, à savoir : « Préparer le sol et sa fertilité, notamment pour la culture du blé, qui nécessite des terres fertiles, contrairement à l’orge et au maïs, qui sont adaptés à une qualité moins fertile ; choisir le type d’engrais qui s’adapte à la nature du sol, en tenant compte des périodes d’utilisation, le choix de la qualité des semences qui conviennent à chaque région et qui résistent à la sécheresse, comme les hauts plateaux et enfin, assurer un suivi régulier pour lutter contre les insectes nuisibles et les mauvaises herbes qui entravent la croissance des plantes». Le respect de ces conditions peut être la clé de la réussite, indique-t-il, du parcours technique agricole, en augmentant le taux de rendement, qui est actuellement limité entre 17 et 20 quintaux par hectare.
« Si nous orientons une partie de la facture consacrée à l’importation de 10 millions de tonnes de blé annuellement, nous pouvons augmenter les rendements de 30 à 40%. Des expériences à Menaa et Bechar ont donné des rendements encourageants, variant entre 60 à 80 quintaux/ha. C’est à travers cette stratégie qu’on peut réduire nos importations en céréales», a-t-il prédit.
Le chef de l’Etat avait instruit, rappelle-t-on, son ministre de l’Agriculture, Abdelhamid Hamdani de stimuler la production de blé dur et de réduire les importations de blé tendre. Lors d’un Conseil des ministres, M. Tebboune avait mis en avant l’importance de l’adoption des moyens scientifiques disponibles, en vue de relever les niveaux de production céréalière.
Le président Tebboune a conseillé de «s’orienter davantage vers la spécialisation de la production du blé dur» sachant qu’il est «le plus coté sur le marché international». La nature même des terres agricoles en Algérie est plus favorable au blé dur qu’au blé tendre. Il est à noter que la feuille de route du secteur, tracée jusqu’en 2024, permettra de réduire la facture d’importation des produits agricoles à hauteur de 2,5 milliards de dollars. La réduction sensible de la facture d’importations notamment, des produits de base comme les céréales, le sucre, la poudre de lait et l’huile, figurait parmi les principaux objectifs du secteur.
Aissa Manseur, expert consultant en agriculture : «L’investissement agricole, otage d’une bureaucratie sans scrupule !»
L’investissement agricole, durant des décennies, a été otage de la bureaucratie qui a complètement « ligoté» son développement. Même si des efforts ont été fournis dans ce sens par l’application de plusieurs programmes avec des enveloppes financières conséquentes, dont l’octroi de crédit avec bonification du taux d’intérêt, les résultats sur le terrain laissent à désirer !
Pour l’expert consultant en agriculture, Aissa manseur, la première entrave à l’investissement agricole, résidait dans l’octroi de terrains agricoles, et bien que des périmètres aient été créés, à cet effet, presque sur tout le territoire national, les opérations d’octroi n’étaient pas du tout claires, en plus de la lourdeur de la machine administrative qui rend l’opération, un parcours de combattant pour ceux désireux d’investir dans le domaine.
Les chanceux bénéficiaires des terrains agricoles sont confrontés, ajoute-t-il, dans une contribution posté sur son compte officiel facebook, aux problèmes de financement, les banques ne jouant pas «complètement» le jeu : l’étude des dossiers prend des mois et même, peut dépasser une année, ce qui décourage le porteur de projet qui l’abandonne carrément !
À cela s’ajoutent, les délais «exagérés» consacrés à la délivrance de divers documents techniques connexes ! L’expert a, en outre, fait savoir que des mesures ont été prises récemment, pour justement faciliter les procédures de l’investissement agricoles par l’abolition de plusieurs étapes administratives jugées bureaucratiques et inutiles.
Ces procédures concernent, essentiellement, l’octroi du foncier agricole, les procédures de financement et l’allègement de toutes les procédures administratives nécessaires. «Le système du guichet unique de l’Office de Développement de l’Agriculture industrielle en terres Sahariennes (ODAS), doit rendre très fluides les procédures d’investissement dans les régions du Sud et il est souhaitable «d’inculquer» cette bonne méthode de gestion à l’Office national des terres agricoles (l’ONTA), pour l’investissement dans les autres régions du pays!», a-t-il conclu.
Synthèse A. R.