Par Lyazid Khaber
«Je n’oublierai jamais le moment ou, pour la première fois, j’ai senti et compris la tragédie de la colonisation. [… ] Depuis ce jour, j’ai honte de mon pays. Depuis ce jour, je ne peux pas rencontrer un Indochinois, un Algérien, un Marocain, sans avoir envie de lui demander pardon.»
Simone Weil
Dans l’édito signé ce dimanche 11 avril, par Philippe Gélie, dans le Figaro, sous le titre : France-Algérie : «L’histoire a bon dos», l’on décèle, encore une fois, ce désir enfoui d’un Français nostalgique, qui trouve l’occasion de «crucifier» tout ce qui est Algérien, dans un écrit qui renseigne sur la «susceptibilité» qui mine depuis toujours les relations entre les deux pays. Notre bienpensant éditorialiste croit tirer la couverture de son côté, rien qu’en se plaçant dans cette «posture commode» qu’il croit en mesure de donner, à lui et à son pays, le droit de reprocher à l’Algérie, les raisons de l’échec d’une coopération, souvent remise en cause par l’Elysée. La vérité est pourtant connue de tous, celle qui fait que la France officielle demeure attachée à sa «haine» et à ses méthodes exécrables, qui font qu’à chaque fois l’on s’amuse à vouloir ridiculiser l’ancien colonisé. Or, on n’est plus à cet âge-là, et l’Algérie, pays indépendant grâce aux sacrifices des meilleurs de ses enfants, ne doit rien à la France. Au contraire ! «Le jeu des apparences diplomatiques», pour reprendre l’expression de cet éditorialiste du Figaro, n’a jamais été autant, le jeu apprécié de l’Hexagone. Si donc, par malheur, Jean Castex a été éconduit, et de la meilleures des manières, ce n’est absolument pas aux Algériens qu’on devra reprocher ce ratage. Puis, si comme il est dit, l’Algérie a choisi de «faire l’impasse sur la coopération que donner l’impression de subir la moindre désinvolture de Paris, même en cette période de Covid où les déplacements sont rares.», c’est qu’elle a bien ses raisons. Aujourd’hui, et même en diplomatie, les choses doivent être bien claires, et rien ne se fera sans le respect que la France officielle doit à l’Algérie. Et dire que «l’histoire a bon dos» ; ce qui sous-entend qu’on la charge indûment de la responsabilité d’une faute qu’elle n’a pas commise, c’est faire l’impasse sur tant d’années de déni, et tant de crimes coloniaux dont les plaies sont encore ouvertes de nos jours. Pis encore, le mal de la France officiel ne s’est malheureusement pas arrêté en 1962, et les politiques françaises le prouvent amplement. Et pour confirmer les propos de M. Gélie, oui, «la France n’a jamais été à la bonne place», car et tout en prétendant ne pas vouloir s’enfermer dans «le piège de la repentance», elle s’engouffre davantage, et à chaque fois, dans le déni, et avec désinvolture. Et si notre bienpensant éditorialiste pense que l’Algérie ravive le passé pour justifier le présent, il devra ne pas oublier que si les Algériens se rappellent bien ce passé douloureux, c’est parce qu’ils n’ont rien vu changer, ni dans le tempérament ni dans les agissements de la France officielle qui pense encore nous soumettre à ses lubies. Ceci dit, si le passé ne sera pas toujours l’excuse du présent ; aucun présent n’est en mesure de justifier le passé.
L. K.