Considérées comme des projets prioritaires afin de parer aux graves pénuries en eau potable de l’été 2021, les stations de dessalement de l’eau de mer dans la capitale et les wilayas environnantes s’apprêtent à entrer en service dès le mois de juin courant, vient d’annoncer la SEAAL (Société des eaux et de l’assainissement d’Alger), tout en se félicitant d’augmenter ses capacités d’approvisionnement de 200 000 m3/jour.
Par Mohamed Naïli
Dans le détail, la société en charge de l’AEP dans la Capitale, et par la voix de son Directeur adjoint, Amine Hamadane, précise que la production pour Alger passera de 750 000 à 950 000 m3/jour, ce qui permettra d’assurer une alimentation quotidienne à 80% de la population d’Alger et une fréquence d’un 1jour sur 2 pour les 20% restants. Ce qui signifie pour la SEAAL une amélioration par rapport l’année précédente où 75% des ménages dans la capitale ont accès à l’eau 1j/2.
Ce renforcement des capacités de production est ainsi permis par l’entrée en service des stations de dessalement d’Aïn Benian, avec des capacités de 25 000 m3/jour et celle de Bordj el Kiffan (10 000 m3/j). Dès le mois de juillet prochain, c’est la station de dessalement d’El Marsa (60 000 m3/j) qui entrera en activité, puis, d’ici la fin de l’année en cours, celle de Korso, dans la wilaya de Boumerdes, avec une capacité de pas moins de 180 000 m3/j.
Si le recours au renforcement des capacités de dessalement de l’eau de mer est à saluer dans la mesure où il permet d’assurer la sécurité hydrique dans les centres urbains, mais, en braquant le regard sur les coûts de revient et autres charges inhérentes, d’aucuns concluent que cette option ne peut être une solution durable pour le règlement de la crise d’eau dans les villes du pays, mais un simple palliatif pour répondre à des situations d’urgence ou ponctuelles.
Certes, aucune évaluation des coûts de réalisation de ces stations n’est rendue publique, mais compte tenu des technologies et équipements utilisés dans ce domaine, importés de surcroît, et les besoins en énergie pour leur fonctionnement, excessivement élevés, il est aisé de constater que le dessalement de l’eau de mer ne peut se faire qu’à coup de factures salées.
60 milliards DA/an
Néanmoins, dans un précédent rapport sur l’évolution de la consommation d’énergie électrique sur le marché national, Sonelgaz a mis en exergue une forte hausse de consommation dans « le segment haute tension » durant la période allant de 2004 à 2014, due notamment à « l’activité des stations de dessalement ». Ce constat du groupe public du gaz et de l’électricité fait allusion ainsi à la série de stations de dessalement installée durant les premières années des années 2000. A cette époque, Sonelgaz a estimé le budget alloué au fonctionnement des stations de dessalement à quelque 60 milliards de dinars annuellement.
Outre les coûts d’acquisition et d’installation de ces unités de production, le processus de traitement de l’eau de mer coûte entre 1 et 9 euros/m3 selon une étude réalisée par l’ONG de protection de l’environnement et de lutte contre la pollution U Levante. Le coût de production de cette eau est en « fonction de la technique utilisée : 9€/m3 par distillation, 3€/m3 par électrodialyse et 1€/m3 par osmose inverse. Par osmose inverse les eaux sont si pures qu’elles doivent être reminéralisées, ce qui implique des coûts supplémentaires. Il faut rajouter enfin les coûts distribution », soulignent les auteurs de ladite étude tout en précisant que « ces procédés sont très énergivores et génèrent d’importantes émissions de gaz à effet de serre ».
Dans le cas de l’Algérie, pays pétrolier et gazier, les coûts de revient de l’eau issue des stations de dessalement sont, à coup sûr, moins élevés comparativement aux pays qui recourent à l’importation du gaz utilisé dans la production d’énergie électrique. Toutefois, compte tenu du prix de l’eau potable fortement soutenu par l’Etat, les répercutions sur le Trésor public des charges de fonctionnement des usines de production d’eau dessalée, près d’une vingtaine réparties sur plusieurs wilayas côtières, ne sont assurément pas moins lourdes.
M. N.