L’un des leviers majeurs de la relance économique et de la diversification des activités demeure le facteur financier, aussi bien en tant que partie constitutive de l’entreprise lors de sa création- à côté du foncier et de la ressource humaine-, que dans sa phase de croisière ou de maturité, où une partie des finances de l’entreprise reste presque toujours liée à la mobilisation de crédits bancaires et, parfois d’autres services, comme les cautionnements et les nantissement de certains marchés. La qualité de la relation commerciale établie entre l’investisseur/entrepreneur et le banquier, supposant la régularité des remboursements du principal et des intérêts ou la libération normale des cautions, finit par fonder la confiance entre les deux parties.
Par Amar Naït Messaoud
Il est vrai, et compréhensible, que dans le cas du dispositif des microcrédits destinées au jeunes entrepreneurs, des « flottements » et des incompréhensions ont été enregistrés amenant certains jeunes à la banqueroute de façon à ce qu’ils ne puissent pas honorer le remboursements de leurs crédits pourtant soutenus par l’État (remboursement différé, bonification, en plus parfois de l’intégration des produits de l’entreprise dans la commande publique, leur garantissant un débouché commercial sans encombre).
Avec l’évolution, au cours de ces dernières années, des micro-entreprises, start-up et des porteurs de projet d’auto-entreprenariat, ce genre de contraintes semble résorbé au profit d’une relation rénovée et assainie entre l’entreprise et l’organisme de crédit.
D’après le bilan établi par la Banque d’Algérie, les crédits à l’économie consentis par les banques jusqu’à la fin de l’année 2024 s’élèvent à 11 256,5 milliards de dinars. Par rapport à l’année 2023, la progression des crédits à l’économie a connu un bond de 5,3 %.
La Banque d’Algérie analyse cette progression comme traduisant «une dynamique de financement stable», comme elle précise que les banques publiques ont assuré 72,9% de l’accroissement global des crédits, contre 27,1% pour les banques privées.
La dynamique économique, telle qu’elle commence à offrir une certaine visibilité, est censé déteindre sur le système bancaire dans une sorte de relation dialectique entreprise-banque. En effet, la question de la relation intime qui lie l’entreprise, candidate au financement, à la banque qui mobilise les crédits de ce financement se pose, plus que jamais avec haut niveau de pertinence.
La modernisation de ce partenariat à l’échelle des pays avancés a fait que des filiales de banques se sont spécialisées dans certains secteurs de l’économie qu’elles financent. Spécialisation signifie avant tout mobilisation de la ressource humaine ayant le profil nécessaire d’expertiser les entreprises candidates aux crédits.
Cette expertise commence par l’établissement de l’état des lieux de l’entreprise en question (santé financière, capacités managériales,…) et se poursuit sur le terrain par le suivi du projet auquel est destiné le financement.
L’Agence algérienne de promotion des investissements (AAPI) fait savoir, sur son site web, que le secteur bancaire algérien est composé de la Banque d’Algérie, 20 banques commerciales et 9 établissements financiers, 5 bureaux de représentation de grandes banques internationales, une bourse des valeurs, une société de clearing chargée des fonctions de dépositaires, une société d’automatisation des transactions interbancaires et de monétique (SATIM), une association des banques et des établissements financiers (ABEF) avec environ 1200 agences bancaires réparties sur le territoire national (1637, selon le dernier rapport de la Banque d’Algérie : 1.272 pour les sept banques publiques et 401 pour les banques privées), une concentration au niveau du Nord du pays et une domination estimée à 99% par les agences bancaires publiques.
Du «sang nouveau» à travers un multi-actionnariat
De plus en plus, les banques sont sollicitées, comme l’aile marchante de l’entreprise, à se déployer d’une manière déterminée sur le terrain économique. Il est vrai que des insuffisances sont relevées, y compris dans les critères d’octroi de crédit, se basant beaucoup plus sur les garanties matérielles (gages) que sur l’étude la faisabilité technique et de la rentabilité commerciale du projet à financer.
L’un des objectifs à assigner à la réforme du secteur des banques figure en bonne place celui de savoir prendre le risque avec l’investisseur ; un risque mesuré soumis à des calculs et pour lequel on anticipe des solutions et des alternatives.
Afin de conférer plus de performance aux banques algériennes, aussi bien dans ce créneau que dans d’autres points d’appui techniques ou managériaux, le gouvernement a lancé, en 2024, l’opération de vente d’actions [offres publiques de vente, OPV] du Crédit populaire d’Algérie (CPA) et de la Banque de développement local (BDL) à des partenaires institutionnels et particuliers.
Au cours de la période « faste » des finances algériennes, étalée entre 2004 et 2015, la relation des entreprises qui sollicitent des crédits d’investissement avec leurs banques a été grevée de moult difficultés, ayant évolué même, à un certain moment, en un climat de suspicion où rôdait l’odeur des affaires de corruption dont certaines ont atterri devant les tribunaux.
Ainsi, la relation entre l’entreprise et la banque, supposée être bâtie sur la logique du gagnant-gagnant, a été affectée dans son fonctionnement régulier et dans transparence.
L’une des conséquences relevées à l’époque par l’Association des banques et établissements financiers (ABEF) était que l’une des problématiques du financement de l’économie nationale par le réseau des banques algériennes était le défaut de remboursement des crédits qui avait atteint, en 2017, le taux de 25 %, situation faisant souvent suite à la banqueroute qui avait affecté les entreprises bénéficiaires de crédits. L’ABEF révéla que, en chiffres absolus, ce taux correspondait à 100 milliards de dinars.
Incontestablement, les aléas et autres difficultés pouvant peser sur les opérations de financement de l’économie sont intimement liés à la nature de l’investissement, à la stratégie de développement adoptée par l’entreprise- y compris l’étude du marché, des input et des output- ainsi qu’à l’action managériale mise en branle pour la gestion à court, moyen et long terme.
C’est, en résumé, de la solvabilité de l’entreprise qu’il s’agit. Néanmoins, le contenu accordé à ce concept a largement évolué de par le monde.
Jadis, la solvabilité était réduite à des cautions précises ou à la mise en gage mobilière ou immobilière pouvant garantir le remboursement du crédit. Aujourd’hui, à l’échelle des personnes morales (sociétés, entreprises et d’autres entités), ce genre de cautionnement épouse de plus en plus le souci de la faisabilité et de la pertinence du projet à financer, d’une part, et le souci de la bonne gestion de l’entreprise qui sollicite le financement, d’autre part.
A.N.M.