Les marins pêcheurs que l’on croyait, sinon riches, du moins à l’abri du besoin, se plaignent de crouler sous le poids des dettes et qu’ils n’arrivent même pas à payer les cotisations dues à la Cnas. Les petits métiers, c’est-à-dire les pêcheurs dont les embarcations n’excèdent pas les sept à huit mètres de long, qui ne travaillent que durant trois ou quatre mois dans l’année, accusent, entre autres, les exploitants des grandes embarcations de ne pas respecter les zones de pêche. En ce sens qu’ils jettent leurs filets dans des endroits dont la profondeur est inférieure à 42 m et qu’ils ne font pas également cas de la taille marchande des poissons. Et la pandémie du coronavirus n’a pas arrangé les choses.
Par Réda Hadi
Déjà en proie à une myriade de difficultés, les 5000 marins pêcheurs de la wilaya de Boumerdès ont vu leur situation socioprofessionnelle empirer depuis l’apparition de la pandémie du nouveau coronavirus. Si la pêche a repris timidement aux ports de Zemmouri et de Cap Djinet, ce n’est pas le cas à Dellys, où, plus de 20% de la population vit des métiers de la mer. En dépit de son exiguïté, le port de cette localité est fréquenté par plus de 1500 pêcheurs et une flottille de plus de 200 embarcations, dont des dizaines de sardiniers et de chalutiers.
En effet, ces pêcheurs se plaignent des conséquences de la pandémie qui durent toujours.
A titre d‘exemple, le propriétaire d’un sardinier acquis dans le cadre de la Cnac, accuse « les exploitants des grandes embarcations de ne pas respecter les zones de pêche en ce sens qu’ils jettent leurs filets dans des endroits dont la profondeur est inférieure à 42 et qu’ils ne font pas également cas de la taille marchande des poissons. De plus, avec la pandémie je n’ai fait que 2 sorties en mer. Ce n’est pas la bonne saison. La récolte est très maigre. Une fois, on a pêché 7 caisses de sardines, soit l’équivalent de 56 000 DA. J‘emploie une douzaine de personnes, entre pêcheurs, mécaniciens et le capitaine. Avec des productions aussi fiables, comment vont-ils nourrir leurs familles?»
Selon ce marin pêcheur, «le mandataire obtient une commission de 10% des gains. Moi en tant qu’armateur, j’ai droit à 45%. Le reste est partagé entre les membres de l’équipage. Le capitaine aura 2 parts, le mécanicien 1,5, le pêcheur 1,25%. Mais les gens pensent qu’on gagne des milliards. Certains nous tiennent pour responsables de la hausse des prix de la sardine alors que la plupart d’entre nous vivent à crédit», révèle-t-il. Selon lui, le meilleur des pêcheurs gagne 35 000 DA/mois.
Les armateurs, eux, se plaignent des charges. A titre d’exemple, le filet de pêche coûte plus de 3 millions de dinars et doit être ramené à 3000 DA avant chaque sortie en mer.
Cet outil de travail peut se déchirer à la moindre fausse manœuvre. A cela s’ajoutent les cotisations Cnas, les frais du gasoil, estimés à 20 000 DA par semaine et ceux liés à l’entretien du navire. Celui-ci doit subir une opération de carénage chaque année dont la moins chère dépasse 40 millions de centimes.
R. H.