La loi de finances complémentaires (LFC) 2021, adoptée par ordonnance, et publiée ce mercredi 9 juin au Journal officiel est désormais entrée en vigueur. Le texte contient de nombreuses mesures, dont plusieurs ajustements budgétaires. Adoptée par les deux Chambres parlementaires, la loi ne se focalise pas uniquement sur les ajustements budgétaires, mais apporte également des mesures de facilitations aux investissements et autres opérations économiques. Cependant, trois faits sont les plus marquants et concernent l’autorisation d’importation de véhicules de moins de 3 ans, la suppression de la règle 49/51 (dans certains cas) et l’augmentation des prix du tabac.
Par Reda Hadi
La disposition relative à la règle 49/51, qui a été supprimée, a été fortement appréciée par le patronat algérien, qui exigeait cette disposition, pour permettre plus de partenariat avec des investisseurs étrangers. En effet, l’article 139 de la loi de finances 2021 disposait que les « sociétés commerciales comportant un ou plusieurs associés étrangers exerçant l’activité d’importation de matières premières, produits et marchandises destinés à la revente en l’état doivent se conformer à ces règles avant le 30 juin 2021. Passé ce délai, les extraits du registre non conformes deviendront sans effet».
Cette suppression vient d’être validée par la LFC qui est entrée en vigueur. Ainsi, l’article 49 de la LFC 2021 dispose, désormais, que, «demeurent assujetties à une participation d’actionnariat national résident à hauteur de 51%, l’activité d’importation de matières premières, produits et marchandises destinés à la revente en l’état et celles revêtant un caractère stratégique, relevant des secteurs définis à l’article 50 de la loi n° 20-07 du 12 Chaoual 1441 correspondant au 4 juin 2020, portant loi de finances complémentaire pour 2020, à l’exclusion des activités d’hydrocarbures et les activités minières. »
Dans la même lignée, la LFC 2021 a instituée une nouvelle taxe sur l’immobilisation des conteneurs au niveau des ports. Les frais d’immobilisation des conteneurs sont calculés, précise la LFC 2021, suivant le tarif prévu dans le contrat de transport ou le connaissement et ne peuvent en aucun cas porter sur une période d’immobilisation allant au-delà de quatre-vingt dix (90) jours, délai de franchise compris.
L’importation des véhicules de moins de trois ans autorisée
Désormais, par ailleurs, la loi paermet aux Algériens d’importer les véhicules de tourisme de moins de trois ans d’âge. L’article 110 autorise, en effet, le «dédouanement pour la mise à la consommation, avec paiement des droits et taxes relevant du régime de droit commun, les véhicules de tourisme de moins de trois ans d’âge, importés par les particuliers résidents, une fois tous les trois ans, sur leurs devises propres, par débit d’un compte devises, ouvert en Algérie».
Toutefois, aucune date n’est fixée pour la publication des modalités d’application. Il faut préciser aussi, que l’autorisation d’importer les véhicules de moins de trois ans d’âge, a été instaurée dans la loi de finances 2020, mais les textes d’application n’ont pas suivi.
Une nouvelle taxe anti-tabac
Les fumeurs se voient infliger une nouvelle hausse de tabac. En effet, s’agissant des sociétés de fabrication de tabacs, l’article 150 bis dispose qu’ «il est institué un impôt complémentaire sur les bénéfices des sociétés applicable aux sociétés de fabrication de tabacs. L’assiette d’imposition de cet impôt est celle soumise à l’impôt sur les bénéfices des sociétés.»
«Le taux de cet impôt est fixé à 10% », précise le même article, qui ajoute : «L’impôt complémentaire sur les bénéfices des sociétés de tabacs est recouvré dans les mêmes conditions que l’impôt sur les bénéfices des sociétés». Cette disposition entraînera une hausse des prix des différents tabacs.
Nabil Djemaa expert agrée en économie : «On supprime le 49/51, mais on oblige des banques à partir »
Réagissant à l’adoption de la loi de finance complémentaire 2021, Nabil Djemaa expert agrée en économie, n’a pas manqué de marquer son étonnement sur plusieurs points.
En effet, l‘expert a apprécié la suppression de la règle des 49/51 : «Cela va permettre de libérer les investissements, mais aussi de permettre au partenaire étranger d’appliquer ses propres lois de gestion, qui diffèrent de celles que l’on pratique chez nous. Cela le rend maitre d’une certaine façon de son investissement », mais de se questionner aussi sur la raison qui a poussé la Banque d’Algérie à exiger une augmentation du capital des banques : « C’est une décision anti-économique, digne des règles du socialisme et du communisme. A cause de cette instruction, le Crédit Agricole (France), a, plié bagages et avec lui, près de 300 sociétés qui y étaient affiliées. C’est un véritable dommage pour l’Algerie, car on reprend d’une main ce que l’on donne de l’autre. D’autres banques étrangères envisagent la même chose, et de se demander au « nom de quoi, on exige à une banque de recapitaliser?»
Abordant la question de l’importation des véhicules de moins de 3 ans, l’expert estime, «que c’est juste un geste électoral», sinon, comment «expliquer que cette disposition figurait dans la loi de finance 2020, mais n’a jamais vu de textes d’application. Des textes qui ne sont toujours pas publiés, ce qui rend la mesure très floue », et de préciser que même si les textes d’application sont publiés, « je ne pense pas que beaucoup d’Algériens puissent se permettre cet achat, vu d’abord le glissement du dinar face à la devise, et qui ne cesse de sombrer», et de souligner qu’à « l’heure actuelle, au prix du billet d’avion ou du bateau, des mesures sanitaires imposées par l’UE, et de toutes les tracasseries administratives , qui peut se le permettre ?», avant de se demander, «pourquoi ne pas créer des groupements ? Utiliser la Sonacome qui est en train de sombrer pour faire des achats groupés et choisir le pays ? En ce moment, des 4X4 flambants neufs se vendent pour une bouchée de pain en Suède. Ces achats rendront l’opération plus facile et surtout, plus rentable pour le citoyen », a-t-il conclu.
R. H.