Benbahmed révèle un cas de grosse surfacturation dans l’importation de produits pharmaceutiques : Une scandaleuse affaire

Industrie pharmaceutique

Photo : D. R.

Le ministre de l’Industrie pharmaceutique, Lotfi Benbahmed, a révélé un gros scandale lié à la surfacturation dans l’importation de médicaments. Un phénomène qui a pris des proportions «inquiétantes», engendrant des pertes énormes au Trésor public, notamment durant les 10 dernières années, où le commerce extérieur évoluait sans aucune réglementation.

Par Akrem R

Benbahmed, en effet, pour illustrer l’ampleur du phénomène, a cité l’exemple d’un laboratoire pharmaceutique qui a importé en 2019 l’équivalent de 70 millions d’euros de matières premières, alors qu’en 2020 et en 2021, et pour les mêmes quantités et produits, la facture a été estimée à seulement 350 000 euros !

Cela signifie, dira-t-il, qu’on payait chaque année plus de 69 millions d’euros sans aucune plus-value pour l’Algérie ! «Cela s’appelle un pillage de l’économie nationale», a dénoncé le Dr. Benbahmed dans un entretien accordé à la chaîne DZ News.

Face à cette situation, le ministère de l’Industrie pharmaceutique a décidé d’une batterie de mesures, afin de réglementer ce secteur et en finir avec ces pratiques «frauduleuses» qui grèvent les finances publiques. Actuellement, dira-t-il, l’importation est désormais mieux régulée, étudiée et surtout, maîtrisée en fonction du marché national. D’ailleurs, c’est grâce à un nouveau dispositif de contrôle basé sur la numérisation et attestations de régulation que des pratiques de surfacturation à l’importation de médicaments ont été révélées.

Un nouveau cahier des charges pour l’importation

Dans ce cadre, le ministre Benbahamed a rappelé la mise en place d’un nouveau cahier des charges pour l’importation des médicaments qui permet d’agir sur trois niveaux. Premièrement,  suivant la nature des produits pharmaceutiques. Dr Benbahmed a précisé que l’Algérie importe uniquement les médicaments essentiels. «Ce choix n’est pas fortuit, il a été fait en concertation avec les médecins à travers le comité des experts cliniciens, au nombre de 340, représentant l’ensemble des spécialités médicales », détaille-t-il, révélant que son département s’attelle à la mise en place d’une liste de médicaments essentiels. Une commission se penche déjà sur cette question.

Deuxième axe : l’attention est focalisée sur la liste des médicaments remboursables par la Sécurité sociale, a indiqué le ministre. Avec cette précision qu’ « il ne sera permis d’importer que les produits qui ne sont pas fabriqués en Algérie ou produits en quantités insuffisantes ». Troisièmement, le ministre a fait savoir que l’importation se fera en fonction du prix des médicaments. Et ce, dans le but de lutter contre la surfacturation.

Questionné, par ailleurs, sur les objectifs de son ministère pour 2020, Dr. Benbahmed est clair : augmenter davantage la production nationale, réduire la facture d’importations et s’orienter vers l’export. C’est un véritable challenge, dont la nouvelle politique adoptée par le secteur donne déjà ses fruits. Les chiffres réalisés en font foi : environ 800 millions d’euros ont été déjà économisés grâce à la diminution de la facture d’importation et l’augmentation de la production nationale d’un milliard d’euros en valeur.

Un milliard d’euros pour l’insuline et les anticancéreux

 Actuellement, selon le ministre, 3 médicaments sur 4 consommés localement, sont fabriqués en Algérie. Soit l’équivalent de 66 % en valeur. « Notre ambition est d’arriver à 70 % suivant les engagements du président de la République. En 2022, on devrait dépasser ce taux », a assuré le ministre.

Ces deux dernières années ont vu une montée en cadence en matière de fabrication de médicaments des laboratoires pharmaceutiques nationaux, s’est-il félicité. L’autre défi à relever par l’industrie pharmaceutique locale, c’est de produire des médicaments anticancéreux et les insulines dont la facture d’importation équivaut à un milliard d’euros ! Selon Lotfi Benbahamed, au courant de 2022, des unités de production d’insuline et d’oncologie entreront en production.

« Nous sommes en contact permanant avec deux firmes internationales pour la mise en service, au courant de 2022, de deux projets de production d’insuline. A cela s’ajoute le fait, qu’il y a plus de 10 projets pour la fabrication de médicaments anticancéreux en Algérie. Trois usines sont phase d’exploitation, les 7 projets restants sont en cours de réalisation», souligne-t-il. Pour le ministre de l’Industrie pharmaceutique, 2022 sera l’année de la production de l’insuline et des produits anticancéreux, insiste-t-il, en joutant que la meilleure façon d’assurer la disponibilité des médicaments, c’est de les produire localement.

Évoquant le segment de l’exportation, le ministre indique que son département lui accorde un intérêt particulier. D’ailleurs, une sous-direction pour l’export a été créée à cet effet, et toute une stratégie est mise en place, rappelle-t-il. Un lot de produits pharmaceutiques, d’une valeur d’un million d’euros, vient d’être expédié vers la Mauritanie, via la nouvelle ligne maritime Alger-Nouakchott. Une foire dédiée aux produits pharmaceutiques algériens sera organisée le 19 mai prochain à Dakar (Sénégal). Les opérateurs et producteurs activant en Algérie sont invités à y participer.

A. R.

Production pharmaceutique algérienne : 478 milliards de DA de chiffre d’affaires en 2021

L’industrie pharmaceutique algérienne a prouvé sa résilience durant cette période de pandémie qui perdure depuis deux ans. Le marché national, évalué à près de 478 milliards de DA en 2021, avec une croissance (2020-2021) de 7,3 % et une croissance pondérée sur 05 années (2017-2021) de 4,3%, selon un exposé présenté par Abdelouahed Kerrar, président de l’Union nationale des opérateurs de la pharmacie (Unop), lors du salon international «Siphal 2022». En effet, ces chiffres montrent que le secteur de l’Industrie pharmaceutique est sur la bonne voie et pourra même enregistrer des taux de croissance à deux chiffres.

En valeur, dira-t-il, la fabrication locale est en nette évolution comparativement avec l’importation d’une croissance pondérée (2017-2021) de + 7,32% versus 1,76% (importation). «La production nationale augmente d’année en année, passant de 380,24 milliards en 2007 à 436,48 milliards en 2008 et 433,49 milliards (2009) et 445,40 milliards en 2020, et, enfin, à 478,37 en 2021», détaille-t-il, relevant que l’augmentation de la production de 6% n’est pas une importante croissance et reste en deçà des capacités de production, vu le nombre d’unités en place. Pour Kerrar, « des croissances à deux chiffres sont réalisables, si toutes les conditions étaient réunies». Il a, ainsi, fait savoir que 233 opérateurs activant dans le domaine pharmaceutique ont mis sur le marché 596 produits nouveaux, soit l’équivalent de 9,5 millions unités d’une valeur de 4,4 milliards de DA de valeur ajoutée. «Ce que nous souhaitons, nous à UNOP, c’est que 2022 soit l’année de l’optimisation de nos capacités et nous pensons pouvoir enregistrer 1000 produits nouveaux qui représenteraient au moins 10 milliards de DA et une augmentation de +127% en dehors des produits hospitaliers», précise-t-il.

A. R.

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