Dans le cadre de la relance du projet du Barrage vert, la wilaya de Bouira est touchée au niveau de sept communes du sud du territoire (Sour El Ghozlane, Dirah, Ridane, Maâmora, El Hakimia, Hadjra Zerga, Taguedite) sur une superficie de 95 000 ha. En effet, sur le flanc sud de la wilaya, la menace du phénomène de désertification se fait de plus en plus dangereuse. La dénudation des sols suite au surpâturage et aux conduites culturales inadaptées, greffée à des conditions climatiques défavorables de quasi aridité, met à mal la vie des ménages ruraux, majoritairement des éleveurs ovins, touchés par la rareté de l’eau et des fourrages.
Par Amar Naït Messaoud
Le projet de réhabilitation et d’extension du Barrage vert est venu à point nommé pour endiguer un tant soit peu l’avancée de la désertification et atténuer les effets des changements climatiques, tout en apportant aux ménages ruraux des soutiens pour leur stabilisation à travers l’amélioration des fourrages, l’installation des vergers arboricoles et la mobilisation de l’eau par les ouvrages de la petites hydraulique (captage de sources, constriction de mares et de bassins de stockage,.).
Dans les programmes 2023 et 2024 du projet de relance du Barrage vert et du programme sectoriel de l’administration des forêts, la forêt de Ksenna, constituée de peuplements naturel de pin d’Alep, située dans la partie nord du périmètre du projet, a bénéficié d’actions de réhabilitions et d’amélioration pour maintenir son rôle et sa fonctionnalité de bande naturelle de verdure que viendront renforcer les plantations du projet en cours. La forêt est située à la limite de la zone pré-steppique et steppique.
La ligne de séparation entre la zone boisée et les étendues de parcours est constituée par la chaîne rocailleuse, en dents de scie, de Djebel Ktef (1474 m d’altitude), et la sierra de Djebel Serdoun (1289 m d’altitude).
Ces deux lignes dénudées, faisant partie des derniers contreforts de l’Atlas tellien, nous plongent frontalement dans la grande plaine steppique qui va jusqu’à la limite de la wilaya de Msila, dans le bassin versant du Hodna, aux flancs érodés, au maigre fourrage et à la production céréalière très faible, voire nulle au cours de ces quatre dernières années.
L’entité forestière qui a pour nom complet « forêt domaniale de Ksenna » qui s’étend sur près de 9000 hectares à travers trois : El Hachimia, Oued El Berdi et El Hakiimia.
Au niveau de cette dernière commune, elle trouve son expression la plus nette, par l’homogénéité des peuplements, la vigueur de leur croissance, l’occupation harmonieuse du sol et la beauté paysagère qui s’en dégage.
Par comparaison avec la couleur ocre des paysages steppiques qui la jouxtent par le sud, le contraste est saisissant.
Sur les trois cantons domaniaux que sont Kririche, Krouma et Kef El Amar, et sur la forêt privée située à leur périphérie- un total de superficie de 1400 hectares-, la vie végétale et animale est revenue en force après les grandes incendies historiques de 1994.
Des incendies de moindre intensité l’ont affectée également au début des années 2000. Il en est résulté des larges trouées vides dans la forêt.
Avec la sécheresse sévère qui a sévi au cours de ces quatre dernières années, la régénération du pin d’Alep a été compromise dans certains endroits. Elle a même laissé place à l’alfa qui a envahi des secteurs entiers de la région (zones pastorales et forêt).
Les actions engagées pour la réhabilitation de cette pinède dans le cadre du projet du Barrage vert, sont principalement les coupes sylvicoles et les compléments de reboisement.
Les coupes sylvicoles sont destinées à harmoniser les peuplement, à les aérer pour recevoir plus de lumière qui va favoriser la croissance des arbres et, enfin, de réduire les risques d’incendie. Cette action a été achevée en 2023.
Quant aux reboisements complémentaires, ils sont destinés à combler les grands vides qui se sont formés après les incendies et où la régénération n’a pas eu lieu.
Cette opération, qui s’étend cette année sur 30 ha, est bien avancée, avec un taux de réalisation de 50 %.
Le reste du volume, en cours actuellement sur le terrain, sera achevé dans quelques semaines.
En outre, une opération d’aménagement de piste sur 7 km au cœur même de la forêt a été réalisée en 2021 pour désenclaver le massif, faciliter les missions de gestion et de police forestière et rendre la zone accessible aux travaux d’aménagement.
Sur un autre plan, la forêt de Ksenna constitue un joyau touristique. Une partie de la forêt, au nord, est engouffrée dans les vallons de Oued Zerrouk, avec une riche biodiversité ; l’autre partie, vers les sud, donne sur le désert steppique.
À quelques kilomètres à l’ouest de la forêt, se trouve la mausolée de Takfarinas, ancien chef de guerre berbère, spécialiste de la guérilla et des raids éclairs, qui gît ici, dans une tombe, une chambre funéraire, surmontée d’un édicule.
Takfarinas a fini son épopée ici, en l’an 24 après J.C., dans une bataille féroce, face aux légionnaires romains. Vaincu après une longue guerre, il se suicide au cours de sa dernière bataille, en exposant sa poitrine aux lances des soldats ennemis.
Ouvrage écologique de première importance par lequel l’Algérie compte endiguer le processus de désertification et atténuer les effets des changements climatiques, le Barrage vert présente aussi une dimension économique, à travers l’implication des populations rurales, et une dimension touristique, à travers la valorisation des sites naturels, historiques ou culturels qui existent dans son périmètre.
A. N. M.