Secteur moribond depuis plus de trente années, la pandémie a causé des dégâts économiques et financiers importants, fatals pour les entreprises du monde des voyages et du tourisme dans notre pays. Le directeur général du tourisme au ministère du Tourisme, de l’Artisanat et du Travail familial, Moussa Ben Tamer, a révélé que son secteur a enregistré des pertes estimées à 30 milliards de dinars par mois, en raison de la crise sanitaire due au Covid-19.
Par Réda Hadi
Dans le monde, les pertes sont estimées selon l’OMT (Organisation mondiale du tourisme) à 1000 milliards de dollars de perte pour l’année 2020, avec comme corollaire, moins d’un milliard de touristes.
Pour M. Bourad Mohamed, spécialiste du tourisme en Algérie, «sans aucun indicateur sur la manière avec laquelle on a estimé ce chiffre, il semblerait qu’il soit en vérité bien plus haut. Pour le Tourisme, comme pour d’autres secteurs, beaucoup de paramètres entrent en jeu, car ce secteur a son propre «écosystème» qui gravite autour. En estimant les nuitées à un prix médian et en prenant en compte un pourcentage de remplissage, on peut avoir une idée des pertes, il en est ainsi de la restauration, des animations, etc. Si notre pays avait adopté le CSI (compte satellite du tourisme), on aurait pu avoir une évaluation la plus proche des pertes. Or, ce système qui a été adopté par les grandes destinations, ne l’a pas été par l’Algérie, alors qu’au Maroc et en Tunisie, on y a facilement accès, et toutes les données y sont groupées en toute transparence»
Restant persuadé que la situation est grave, particulièrement pour les agences de voyages spécialisées dans le Hadj et la Omra, ce spécialiste estime que c’est surtout «celles spécialisées dans la Omra qui en pâtissent le plus, vu que ce marché représente pas moins de 600 millions de dollars. Pour se relever de cette crise, il faut du temps et une réelle restructuration de ce secteur» a-t-il conclu
Evidement, la Covid-19 a accentué davantage la précarité de ce secteur, car les agences de voyages ont raté les 4 saisons touristiques, printemps, été et hiver 2020, plus le printemps 2021.
De plus la fermeture des frontières qui perdure depuis mars 2020, a porté l’estocade aux agences, car l’essentiel de leur chiffre d’affaires, très important en période normale est réalisé par le transport aérien, à 70% en ventes des billets secs ou dans le cadre de packages complets vers l’étranger, Omra/Hadj, Turquie, Tunisie, Maroc, Egypte, Asie, Canada, Amérique…
Le secteur arrivera t-il à surmonter cette crise ?
Beaucoup d’observateurs sont sceptiques et disent que l’Etat n’a pas mis en place ou incité les investisseurs privés à le faire, notamment, par des hébergements adéquats, des terrains de camping aux normes internationales, des centres de vacances de plein air, des auberges, des chalets, des hôtels de 1* et 2*. Ce qui fait que notre pays, en 2021, est en sous-capacité litière, pour le tourisme balnéaire, moins de 60.000 lits camping inclus, pour le tourisme saharien, moins de 10.000 lits, et pour le tourisme de montagne, moins de 2000 lits.
Des économistes affirment, eux aussi, qu’aucune mesure d’assistance financière n’a été prise par le secteur touristique, car lui-même est «fauché», en comparaison avec celui des anciens moudjahidine qui est 74 fois supérieur, assurent-ils.
Ce secteur se dit être terriblement lésé et les différentes associations ou regroupements corporatistes, affirment que l’Etat les a « laissés tombé ».
Selon des responsables syndicaux, des courriers de la FNAT (Fédération nationale des agence de tourisme) et du SNAV (Syndicat des agences de tourisme) ont été transmis au ministère du Tourisme en été 2020. Toujours selon les mêmes sources, ce dernier les exploitera en faisant lui-même la synthèse des doléances des agences sinistrées et transmis au ministère des Finances. Mais aucune réponse ne leur a été donnée. Le SNAV appelle les autorités concernées à «un accompagnement et à une aide pour aplanir les obstacles ».
R. H.