La finance islamique fait son chemin en Algérie. A peine lancée, cette finance connait un engouement sans précédent. Selon les professionnels du secteur, la finance islamique enregistre des taux de croissance très importants, jusqu’à deux chiffres.
Par Akrem R.
Les banques publiques qui se sont déjà lancées dans cette industrie de la finance islamique depuis maintenant un an et demi, ont réussi à s’accaparer de 10% du marché. En effet, un montant global de 550 milliards de DA a été mobilisé grâce à cette finance. Des chiffres encourageants. Le Crédit populaire d’Algérie (CPA), à lui seul, a réussi à collecter 16 milliards de DA en une année et demi et avec un portefeuille clients de 26 000 comptes.
« C’est énorme! », dira Sofiane Mazari, chef division de la finance islamique au «CPA» en marge des travaux de la 7 éme édition du Forum Algérien de la Finance Islamique (FAFI) organisé, hier, à Alger.
Même constat chez la Banque d’Al Salam Bank, dont les épargnes mobilisées dans le cadre de cette finance sont passées de 4 milliards de DA en 2016 à 39 milliards de DA en 2022, soit un taux de croissance de 47%, a fait savoir son DG, Nacer Haider. Et d’ajouter : « Le nombre de comptes ouverts dans ce segment est passé, également, de 1600 comptes à 37 000, actuellement. Il y a un intérêt particulier pour la finance islamique de la part des les ménages, ce qui permettra de drainer et de capter de grosses sommes d’argent circulant hors circuit bancaire». En somme, l’avenir est promoteur et les investissements consentis actuellement par les banquiers, auront des retombées positifs et un retour sur investissement dans le futur. Il est à noter que le gouvernement compte énormément sur ce segment pour réussir sa stratégie d’inclusion financière. Tous les moyens mobilisés pour drainer les fonds de l’informel, sont estimés, selon les chiffres du Premier ministre, à quelque 6000 milliards de DA ! Les banquiers se disent prêts à diversifier leurs gammes en matière de produits et services afin d’atteindre l’objectif escompté, à savoir, drainer ces fonds et réduire le recours au cash.
Dans la stratégie des banques algériennes (privées et publiques), les banques se sont lancées dans la bataille d’élargissement de leurs réseaus, en multipliant le nombre d’agences et guichets dédiés à la finance islamique.
Le DG d’Al Salam Bank a indiqué que la finance islamique est un levier de développement en Algérie, avec un avenir plein d’ambitions. M. Haider s’est félicité du développement du cadre réglementaire de cette finance, en rappelant que les activités et les produits de ce segment ont été même pratiqués avant la promulgation de la loi actuelle. Pour lui, la balle est dans le camp des banquiers pour développer cette industrie de la finance islamique en Algérie. Outre la digitalisation et la diversification de nos gammes de produits, indique M. Haider, il y a lieu d’engager une vaste campagne de communication et de la vulgarisation afin de rallier les citoyens vers le circuit bancaire. Pour lui, il faut faciliter l’accès aux crédits de la consommation. D’ailleurs, les banques présentes à cet événement s’impatientent, quant à voir le marché d’automobile neuf relancé. Le retour du crédit à la consommation pour véhicules va certainement donner une nouvelle impulsion à l’inclusion financière. Sur ce point, le DG d’Al Salam Bank a rappelé que sa banque avait atteint le pic en 2019 avec 400 milliards pour les crédits à la consommation. Même son de cloche chez les autres banques (BNA, ABC, CPA et autres). Ainsi, de nouveaux produits seront lancés également dans le domaine de l’immobilier et du tourisme.
Il est à noter que cette manifestation a vu la participation de présidents et directeurs généraux d’institutions financières islamiques, des investisseurs, des acteurs économiques ainsi que de nombreux experts de la finance islamique.
Plusieurs thématiques ont été abordées lors de ce forum, tels que les opportunités de la finance islamique en Algérie, les outils de technologies de l’information pour l’expansion de la finance islamique, El Takaful, un secteur indissociable de la banque islamique.
A. R.
Sofiane Mazari, chef division de la finance islamique au CPA: « Nous sommes le plus grand réseau de ce secteur en Algérie! »
La finance islamique est un projet qui date de plusieurs années. Depuis 2020, donc, le Crédit populaire d’Algérie, s’est lancé dans la finance islamique (une fenêtre islamique). «Actuellement, je pense que nous sommes le plus grand réseau en Algérie, avec 91 guichets de la finance islamique sur les 91 agences banques implantées à travers le pays. Et nous aspirons à aller au delà, puisque nous avons un projet pour le développement d’agences dédiés, exclusivement, à la finance islamique dans un futur plus proche. Durant les deux prochaines années, nous allons avoir entre 10 à 12 agences sur le territoire national», a indiqué Sofiane Mazari, chef division de la finance islamique au CPA.
En matière de performances, « je vous rappelle qu’actuellement, nous sommes à 26 000 clients, un nombre très important par rapport au marché; en l’espace d’une année et demi, nous avons pu avoir tout ce nombre. La plupart des clients sont des individus, parceque les gens sont surtout intéressés par les comptes-épargne. D’ailleurs, nous avons 98% des dépôts épargnes dans des comptes islamiques qui sont rémunérés et, par ailleurs, nous avons également pu lever un montant important de l’ordre de 16 milliards de DA collecté depuis octobre dernier», indique-t-il.
Et d’ajouter, « nous avons, également, sur le marché depuis quelque mois, certains produits de la finance islamique destinés aux particuliers».
Le même responsable a annoncé que le CPA va lancer de nouveaux produits dans les prochains jours destinés à l’entreprise pour financer, notamment, l’investissement. «C’est très important, concernant, en particulier, les investissements immobiliers et les équipements industriels, et nous allons, également, lancer un nouveau produit d’épargne: nous alons va ouvrir la possibilité aux gens de participer au financement du portefeuille de la CPA», affirme-t-il.
L’ensemble des produits seront sous forme et conforme à la charia islamique, validés et certifiés par le comité national de la fatwa, assure-t-il. Le marché est très profond et très important, dira-t-il, affirmant que «nous faisons tout notre possible pour satisfaire la demande et tous les moyens sont mobilisés, pour ce faire. Il y aune réelle volonté chez la Banque d’Algérie et une volonté des pouvoirs publics pour développer l’industrie de la finance islamique».
Propos recuillis par A. R.
Pascal Portes, directeur commercial d’Intervalle-technologies: « Nous proposons des solutions en matière de cobanking »:
Eco Times: Pouvez-vous nous présenter votre société et quelles en sont sont les domaines d’activités ?
Pascal Portes: Intervalle technologie est une société de droit algérien en activité depuis 14 ans, qui a deux domaines d’activités : le premier domaine c’est cyber-sécurité. nous sommes parmi les rares acteurs en Algérie a traiter de la cyber-sécurité. Nous sommes parmi les leaders dans ce domaine en Algérie qui traitons de la question de la cyber-sécurité et nous intervenons au-delà de l’Algérie, en Afrique et même en Europe.
L’autre activité sur laquelle nous intervenons, c’est la distribution de solutions bancaires et développement de solutions bancaires. C’est à ce titre que nous sommes présents à ce forum. On est, depuis le début de cette année 2022, distributeur et intégrateur d’une solution mondiale en matière de cobanking et cobanking finance islamique. Infosys Finacle est un leader indien qui est reconnu mondialement, un des leaders, sinon, le leader mondial en matière de solution bancaire du cobanking.
Est-ce que vous avez un aperçu sur le marché algérien et quelles sont vos propositions pour développer la finance islamique en Algérie ?
Bien entendu, il y a des banques ayant un grand réseau et de petites banques spécialisées dans un marché assez divers avec parfois des solutions récentes et parfois présentielles. Comme le marché se préoccupe de suivre le mouvement digital, cela impose la nécessité de changement de systèmes. De ce point de vue, il y a nécessité d’être là, au bon moment, pour accompagner ces banques avec de bons systèmes et de bons de conseils.
On parle du digital fabriqué, selon une approche permettant de faire toutes les opérations en même temps et sans se déplacer. Le mobile a créé une véritable révolution pour les activités traditionnelles et même pour le paiement, et ce, sans changement dans l’équipement des banques et l’ambition de l’autre côté de solutions de pointes
Nous proposons, en fait, deux solutions de la finance islamique en matière de produit de gestion de dépôt et de financement, en conformité avec la charia, mais avec la dimension digitale. La finance islamique, comme la finance conventionnelle, peut bénéficier du digital et accélérer ce phénomène.
Des solutions pour la mobilisation des fonds circulant dans l’informel ?
Oui! L’outil idéal est l’inclusion financière et d’éviter le recours au cash. Pour nous, la solution que nous avons choisie, a eu un succès sur le marché indien, justement sur l’aspect inclusion et non sur le recours au cash. Elle a réalisé un vrai succès dans les zones rurales. Au lieu d’utiliser le cash, on utilise un mobile pour les différentes transactions (paiement, transfert d’argent, etc.), QR code. Sans difficulté technique, sans carte. Le mobil est le plus simple à utiliser.
Propos recueillis par A. R.
