Depuis son entrée en vigueur, en janvier 2021, la Zlecaf (Zone de libre-échange continentale africaine) fait de plus en plus objet de suggestions pour booster les échanges commerciaux entre les pays de la région. Ainsi, un peu plus d’un mois après la validation de l’offre algérienne relative aux « exonérations temporaires sur les grilles tarifaires » par le secrétariat général de cet ensemble régional, une nouvelle réflexion vient d’être lancée et concerne, cette fois-ci, les barrières non tarifaires (BNT).
Par Mohamed Naïli
Rendue publique, hier, par la publication spécialisée en économie panafricaine, Afrimag, la réflexion menée sous forme d’étude par un groupe d’experts requiert l’ « élimination des barrières non tarifaires pour accroitre le commerce transfrontalier » entre les pays signataires de l’accord portant la mise en œuvre de la Zlecaf. « L’élimination progressive des barrières non-tarifaires est un défi que les gouvernements africains doivent relever pour stimuler l’impact de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) sur le développement », poursuit la réflexion, tout en mettant en garde que « la persistance des barrières non-tarifaires qui ont étouffé le commerce transfrontalier dans le passé pourrait continuer à constituer un obstacle majeur pendant la mise en œuvre de l’accord commercial ».
En guise d’arguments à la thèse qu’ils viennent d’avancer concernant les BNT, les auteurs de l’étude en question affirment que « l’élimination des droits de douane sur le commerce intra-régional augmenterait le commerce dans la région d’environ 15% à 25 % à moyen terme, alors que la réduction de moitié des barrières non-tarifaires ferait plus que doubler ces effets ».
Allant dans le détail, ils relèvent aussi que la limitation du principe de fonctionnement de la Zlecaf à la seule levée des tarifs douaniers n’aura qu’un impact relatif sur la croissance des échanges commerciaux intra-africains, ce qui nécessite donc la levée de l’ensemble des obstacles se présentant sous forme de barrières non tarifaires pour atteindre les objectifs tracés dans le cadre de cette initiative continentale. « Les baisses tarifaires ont un effet limité sur le bien-être et que seule la réduction simultanée des obstacles tarifaires et non-tarifaires peut avoir des effets bénéfiques et notables sur le bien-être et le PIB (au sein de l’espace panafricain relevant de la Zlecaf, ndlr) », est-il souligné à cet égard.
Par ailleurs, en évoquant la question des barrières non tarifaires et leurs enjeux dans le sillage de la mise en œuvre de cette zones de libre-échange, l’association algérienne CARE (Cercle d’action et de réflexion pour l’entreprise), notait de son côté que ce projet (Zecaf) « implique un changement majeur (dans) l’environnement légal et réglementaire qui encadre et régule le commerce extérieur des pays africains », car, estime les experts du CARE, « la véritable protection contre l’afflux des importations est généralement adossée, non pas au niveau des droits de douane, mais à toute une panoplie de barrières non tarifaires par essence nettement plus dissuasives ». La levée de ces dernières se présente ainsi comme une condition sine qua non pour permettre au commerce intra-régional de prendre son élan.
90% des tarifs douaniers à lever sur 5 ans
Pour l’Algérie, estime le CARE, « cela implique trois types d’engagements précis et extrêmement sensibles, à savoir, recenser et publier l’ensemble des règlementations et normes applicables aux importations et auxquelles les entreprises africaines doivent se conformer, à éliminer l’ensemble des obstacles non nécessaires et non justifiés par des contraintes liées à la sécurité, à l’ordre public, à la santé ou à la protection de l’environnement, enfin, désigner un point focal auquel les entreprises africaines, confrontées à des barrières autres que tarifaires au moment d’exporter leurs produits ou leurs services vers l’Algérie, pourraient adresser leurs requêtes ou demander des renseignements quant à la voie à suivre pour contourner de tels obstacles ».
En outre, pour ce qui est des barrières tarifaires, l’Algérie a présenté une offre relative aux exonérations temporaires sur les grilles tarifaires qui a été validée par le secrétariat général de la Zlecaf lors de la 9ème réunion du Conseil des ministres du Commerce des pays membres qui a eu lieu en juillet dernier dans la capitale ghanéenne, Accra.
A travers cette offre qui, selon le ministère du Commerce et de la promotion des exportations, « constitue un outil principal pour le lancement effectif des échanges commerciaux interafricains », il sera procédé au démantèlement progressif des barrières tarifaires sur une durée de 5 ans pour 90% des tarifs douaniers, sur une durée de 10 ans pour 7% des tarifs douaniers, tandis que les 3% restants « ne sont pas concernés par le démantèlement tarifaire et sont connus principalement pour être des produits très sensibles, qui sont déterminés par chaque pays », a précisé le Département de Kamel Rezig à l’issue de la validation de l’offre algérienne par le secrétariat général de la Zlecaf.
Au-delà des barrières douanières, la nouvelle réflexion sur les mécanismes à mettre en place pour renforcer la dynamique des échanges commerciaux au sein de la Zlecaf met l’accent aussi sur le volet logistique. « Outre l’élimination progressive des barrières non-tarifaires, il sera de plus en plus important, lors de sa mise en œuvre, de combler le déficit d’infrastructures, qui a constitué un obstacle majeur à la croissance économique et à l’expansion du commerce intra-africain », est il noté sur ce point.
Dans ce volet, il y a lieu de constater que l’Algérie n’a pas manqué de faire preuve d’anticipation, notamment avec la promulgation cet été de la loi portant création de zones franches, l’accélération de la réalisation de la route transsaharienne, devenue désormais corridor économique auquel prennent part, en plus de l’Algérie, la Tunisie, le Mali, le Niger, le Tchad et le Nigéria. L’annonce de la création avant la fin de l’année en cours d’une filiale de la BNA (Banque nationale d’Algérie) dans la capitale sénégalaise, Dakar, s’inscrit également dans le cadre de l’intensification des démarches pour booster la présence des entreprises algériennes sur le marché africain.
M. N.