Au sujet de son célèbre Essai sur le principe de population, paru en 1802, Robert Malthus avait noté dans ses Principes de l’économie politique (1820) : «L’essai sur le principe de population que j’ai publié en 1798 me fut suggéré par un essai que M. Godwin a publié dans son Inquirer. J’ai alors suivi l’impulsion du moment et travaillé avec les éléments que j’avais sous la main dans ma résidence campagnarde. Hume, Wallace, Adam Smith et le Dr Price ont été les auteurs dont je me suis inspiré pour dégager le principe sur lequel est basé mon Essai. J’avais alors pour but d’appliquer ce principe pour vérifier l’exactitude des théories selon lesquelles l’homme et la société sont perfectibles : on sait qu’à cette époque ces théories retenaient largement l’attention du public.»
Par Rachid Mihoubi
Après un premier livre (perdu) intitulé la Crise (1796), Malthus étale sa doctrine (le «malthusianisme»), dont le but est de réguler et de contrôler la croissance de la population, dans son Essai sur le principe des populations. C’est ainsi que dans cette célèbre œuvre, il prédit une catastrophe démographique. Il démontre que la population augmente de façon exponentielle (1, 2, 4, 8, 16, …) alors que les ressources alimentaires augmentent de façon arithmétique (1, 2, 3, 4, 5, …). Sur cette base pessimiste, il prédit que les ressources naturelles ne seront pas assez suffisantes pour nourrir une population qui augmente de façon constante.
Craignant une augmentation de la pauvreté, Malthus a, parfois, émis des propos choquants en refusant, par exemple, l’assistance sociale à la classe pauvre et aux démunis. Il voulait favoriser la contrainte morale pour encourager les couples sans enfants et condamne la conception hors mariage.
Selon lui, pour réguler la croissance de la population, le changement du comportement des hommes est nécessaire pour aboutir à une baisse du taux de natalité. A côté de cela, il prône d’améliorer les conditions de production des moyens de subsistance, tout en proposant d’instaurer un impôt sur les enfants selon leur taille et leur poids, ou de donner des cadeaux aux couples sans progéniture.
Les théories de Robert Malthus ont fait des émules jusqu’au XXe siècle. On a ainsi vu des politiques malthusiennes en Chine où les régulations des naissances ont été drastiques, entre 1979 et 2015, avec la limitation d’un enfant par famille. Dans le sous-continent indien, dans les années 1960, les pères de famille qui acceptaient de se faire stériliser recevaient, quant à eux, un poste à transistors.
Cependant, les théories de Malthus ne se sont pas concrétisées en raison de plusieurs phénomènes, entre autres la révolution verte qui a permis d’accroître les rendements des terres agricoles, une révolution industrielle fulgurante et une baisse de la natalité…
Bio expresse :
Thomas Robert Malthus est l’un des plus grands économistes de l’école classique. Il naquit dans le Surrey (sud-est de l’Angleterre), le 13 février 1766, et mourut à Somerset (sud-ouest) le 23 décembre 1834. A l’instar de son compatriote, le célèbre Adam Smith (1723-1790), il était un pasteur anglican connu surtout pour ses travaux sur le problème des rapports entre la population et les ressources économiques. En effet, il était affecté et scandalisé par l’extrême pauvreté des habitants de sa paroisse. Seulement, Robert Malthus se différenciait de son célèbre aîné par ses analyses d’une vision pessimiste, au contraire de Smith, qui prônait une vision optimiste et un équilibre harmonieux et stable de la chose économique.
Robert Malthus était issu d’une famille nombreuse mais aisée et dont le père correspondait avec les penseurs et philosophes de son temps, à l’image de David Hume (1711-1776) et de Jean-Jacques Rousseau (1712-1778).
Après de solides études à l’université de Cambridge, Malthus obtient une chaire en 1793, et devient pasteur anglican quatre années plus tard. En 1802, il publie son célèbre Essai sur le principe de population, œuvre traduite en français (en 1809), mais qui connaît un immense succès et provoque une grande polémique en Angleterre. Malthus entreprit, ensuite, de visiter le Danemark, la Suède et la Russie, pour approfondir ses connaissances.
En 1804, Robert Malthus est nommé professeur d’économie politique au collège de la fameuse Compagnie anglaise des Indes orientales, poste qu’il occupe jusqu’à sa mort en 1834. Parmi ses ouvrages, citons les Principes d’économie politique, qui fut publié en 1820.
R. M.