Alors que le marché est déjà sous pression au vu de la conjoncture internationale et les tensions sur l’approvisionnement du marché européen en produits énergétiques russes, toutes les sphères de la finance mondiale étaient braquées hier sur l’évolution des cours du pétrole et du gaz, alors que l’Organisation des pays exportateurs du pétrole et leurs alliés, regroupés sous la bannière OPEP+, tenait une réunion décisive. Cependant, les divergences apparues lors de la visite d’Emmanuel Macron à Alger entre Paris et Madrid sur l’approvisionnement en gaz s’accentuent ces deux derniers jours.
Par Mohamed Naïli
Dès le milieu de l’après-midi, la première décision clé de cette réunion est annoncée et consiste en une réduction de la production de 100.000 barils par jour en octobre. Cette décision intervient donc sous forme de renonciation à celle prise par les membres de ladite organisation il y a un mois et qui portait sur l’injection de la même quantité (100.000 b/j) dès septembre.
Les médias suivant le déroulement des travaux de la réunion et ayant relayé l’information précisent que, lors de leurs 32ème réunion, les membres de l’OPEP+ ont décidé de ce retrait de 100.000 b/j après avoir constaté un surplus de production sur le marché et un ralentissement relatif de la demande en raison de perspectives peu favorables sur la reprise de l’économie mondiale à court terme.
Toutefois, la décision de la 32ème réunion de l’OPEP+ était prévisible, sachant que, selon Reuters, l’Organisation avait indiqué dans un rapport publié la semaine dernière que le marché pétrolier mondial enregistrerait un excédent plus important qu’anticipé en 2022 en raison de la hausse des prix de l’énergie et du durcissement des politiques monétaires, facteurs de ralentissement de la demande.
De leur côté, les marchés n’ont pas tardé à réagir à la décision de la réunion de l’OPEP+, avec les cours du pétrole ayant poursuivi leur évolution vers le haut. Ainsi, les contrats à terme sur le brent ont enregistré une hausse de 2,47 dollars, soit 2,4%, pour atteindre 95,39 dollars le baril, après avoir augmenté de 0,7% vendredi dernier à la clôture de la dernière journée de la semaine. Le brut américain West Texas Intermediate, quant à lui, a atteint les 88,81 dollars le baril, en hausse de 1,94 dollar, soit 2,23%, après une hausse de 0,3% lors de la session précédente.
Observant une tendance haussière inédite ces derniers mois, le marché gazier, quant à lui, évolue au rythme des tensions en Europe sur le gaz russe. Ainsi, durant la journée d’hier, les informations émanant des principales places de spéculation ont fait état d’un bond spectaculaire des prix du gaz naturel, et ce, après l’annonce du maintien de l’arrêt du gazoduc Nord Stream 1 qui est dû, selon la firme pétrolière russe Gazprom, à la découverte de fuites d’huile sur des turbines du gazoduc, nécessitant des interventions des équipes de maintenance. Dans la matinée d’hier, vers 09h00 GMT, le contrat à terme du TTF néerlandais (gaz), référence du marché européen évoluait à 278,500 euros le mégawattheure (MWh), s’envolant ainsi de près de 30%, soit sa plus forte hausse en une séance depuis les premiers jours du début de la guerre russo-ukrainienne.
Medgaz, MidCat et querelles franco-espagnoles
Cependant, au sein de l’Union européenne, déjà menacée par des pénuries durant la saison hivernale qui s’approche, des querelles prennent place de plus en plus entre certains de ses membres sur la démarche à suivre pour sécuriser l’approvisionnement des 27 en gaz. C’est le cas entre la France et l’Espagne qui, depuis la visite du président Macron en Algérie, multiplient des échanges d’accusations sur la démarche à suivre dans le domaine énergétique.
En effet, au moment où l’Espagne émettait le souhait de voir le président français négocier avec l’Algérie la possibilité de renforcer ses livraisons de gaz vers l’Europe à travers le gazoduc Medgaz, reliant l’Algérie et l’Espagne, puis l’activation du projet de gazoduc MidCat assurant une connexion depuis la Catalogne vers l’Europe centrale en passant par la France, le chef de l’Elysée a opté pour une démarche bilatérale qui s’est traduite par l’ouverture de négociations entre Sonatrach et son homologue français Engie pour négocier de nouveaux contrats gaziers entre Alger et Paris sans y associer d’autres pays.
Sous le titre «entre la France et l’Espagne, querelle autour du gazoduc MidCat», le quotidien français du soir, Le Monde, dans son édition datée d’aujourd’hui, rapporte qu’à la décision de la France qui «a douché les espoirs de l’Espagne», Madrid regrette «l’égoïsme français». Le MidCat est en tout cas une «infrastructure, reliée à l’Algérie par le gazoduc sous-marin Medgaz, d’une capacité de 10 milliards de mètres cubes par an, l’était aussi, jusqu’à sa fermeture, le 1er novembre 2021, après une crise entre l’Algérie et le Maroc, par le gazoduc Maghreb-Europe», rappelle aussi Le Monde.
Après avoir perdu ses chances de renforcer ses approvisionnements en gaz algérien, qui pourtant était son fournisseur historique si ce n’est la versatilité politico-diplomatique du gouvernement Sanchez, l’Espagne veut ainsi bénéficier de quotas supplémentaires, que ce soit en gaz algérien ou d’autre source, à travers ce gazoduc MidCat dont Paris a décidé le blocage. M. N.