Par Lies HAMIDI
Les transformations alimentaires relèvent de nos jours de l’habituel et du quotidien. Chacun de nous achète du transformé par séduction, par facilité et par praticité : le monde est envahi par de nouveaux besoins et de nouvelles attentes ont vu le jour.
Le succès des plats préparés répond au vœu des consommateurs soucieux de produits faciles à consommer et peu chers, dit-on.
Mais a-t-on pensé à la santé et aux risques sanitaires immédiats ou à plus long terme ? Sommes-nous conscients des transformations chimiques, physiques et biologiques subies par les aliments avant leur consommation ?
Sommes-nous au courant de la contenance de ces aliments, bourrés d’additifs et autres ingrédients industriels tout en étant pauvres en fibres, en minéraux et en vitamines ?
Ce sont autant de questions qui interpellent notre conscience et la collectivité dans son ensemble.
Pour ce faire, une définition des produits transformés s’impose pour permettre à tout consommateur de manifester un comportement responsable et réfléchi, lors de l’achat d’un produit alimentaire.
Nous nous conterons, ici, de rappeler le classement des aliments donné lors de notre précédente édition et d’énumérer deux autres méthodes de classification (NOVA ET SIGA) :
– Les aliments peu ou non transformés
Les aliments non transformés sont ceux qui n’ont subi aucune altération ou transformation (légumes, fruits, œufs, yaourts à base de lait…).
On peut inclure dans cette catégorie les aliments peu transformés : ils sont séchés, triés, lavés ou broyés dans le but d’en faciliter l’utilisation ou le temps de préparation.
– Les aliments ou ingrédients transformés
Les aliments transformés, sans risque pour la santé, sont des produits naturels auxquels ont été ajoutés du sel, du sucre ou bien de l’huile et du vinaigre. Il s’agit pour l’essentiel, de conserves de légumes et de fruits en bocaux ou en boite.
Les ingrédients transformés, quant à eux, sont des aliments naturels, obtenus par des procédés mécaniques tels que le broyage ou le concassage (huiles végétales, sucre de table, sel…).
– Les aliments ultra-transformés
Les aliments ultra-transformés passent par des étapes de traitement/conditionnement et subissent des modifications chimiques permettant d’obtenir un produit fini.
Prêt à être consommé, ledit produit est attractif, olfactif et gustatif : les aliments, ici, sont préparés à base d’ingrédients et autres additifs alimentaires qui en améliorent le goût, la texture ou encore prolongent la conservation (additifs affectés d’un numéro : E 100 colorants, E 200 conservateurs, E 300 antioxydants,…E 600 exhausteurs de goût,… E 900 édulcorants….).
Par ailleurs, parmi le peu de procédés de classification des aliments selon leur degré de transformation, c’est la méthode NOVA (nouveau en portugais), conduite par une équipe de chercheurs brésiliens, qui s’est imposée dans les milieux de la science et de la connaissance. Elle est utilisée à l’heure actuelle, par les autorités sanitaires, par les professionnels de la nutrition et autres épidémiologistes dans le cadre de leurs recherches.
Cette classification comporte quatre (04) niveaux :
Groupe1– aliments bruts ou peu transformés : fruits, légumes, viande, pates, lait…
Groupe2– ingrédients issus de matières brutes par pressage, raffinage, broyage, séchage : sel, huile, sucre….
Groupe3– aliments transformés à partir des denrées des groupes 1 et 2 : légumes ou fruits en conserve, graines et noix salées, viandes fumées, poissons en conserve…
Groupe4– produits des précédents groupes + ingrédients industriels (huile hydrogénée, sirop de glucose…) et additifs cosmétiques (colorant, arome, exhausteur de goût) + procédés de fabrication industriels tels que le chauffage à haute température, extrusion, cracking….
En France le système de notation SIGA (suivre en portugais) élaboré par une start-up française, se décline en sept (07) niveaux :
G1-non transformé : produits bruts,
G2-peu transformé : traitement simple + ingrédients culinaires,
G3-transformé équilibré : aliments du groupe 1 et 2 + gras et sel en quantités modérées,
G4-transformé gourmand : aliments du groupe 1 et 2 + gras, sucre et sel, en quantités élevées,
G5-ultratransformé équilibré : proche des aliments du groupe 3 + un marqueur d’ultra transformation (additif ou ingrédient industriel),
G6-ultratransformé gourmand : proche des aliments du groupe 4 + un marqueur d’ultra transformation,
G7-ultratransformé à limiter : incorpore plusieurs marqueurs d’ultra transformation. En Algérie, des règles de prévention ayant trait à la consommation d’aliments sont prévues par la législation alimentaire.
Ainsi, conformément à loi 09- 03 du 25.02.2009 modifiée, relative à la protection du consommateur et à la répression des fraudes, notamment son article 6, « tout intervenant dans le processus de mise à la consommation des denrées alimentaires doit veiller au respect des conditions(…) de transformation et de stockage (…) et s’assurer qu’elles ne peuvent pas être altérées par des agents biologiques, chimiques ou physiques »(…).
De même, nous rappelle l’article 51 du décret exécutif 17-140 du 11 avril 2017 fixant les conditions d’hygiène lors du processus de mise en consommation humaine des produits alimentaires, « les matériaux constitutifs d’emballage des denrées alimentaires, ne doivent pas être une source de contamination(…) ».
Il est avéré en effet, que des substances chimiques provenant des emballages (présence de bisphénol, un produit synthétique utilisé dans les plastiques), sont à même de contaminer les aliments.
Au total, l’on peut affirmer que quel que soit la méthode utilisée, les aliments ultra transformés que nous ingérons, peuvent contenir des produits nuisibles à la santé humaine et seraient dépourvus de qualité nutritionnelle (sucre, sel et gras).
Dans la catégorie des produits gras : il faut éviter les gras saturés qu’on retrouve dans la viande de mouton, la viande séchée ou badigeonnée d’ajouts conservateurs, les soupes en conserve, les aliments frits et plus généralement tous les produits riches en matière grasse, tels que le beurre, le fromage ou la charcuterie.
Dans la catégorie des produits sucrés : il est crucial de s’éloigner des produits sucrés à fort index glycémique : viennoiseries, sodas, gâteaux et bonbons, boissons sucrées et énergisantes….
Outre qu’il favorise certains cancers et les maladies cardiovasculaires, le sucre raffiné accentue le diabète et est responsable du taux élevé de triglycérides et de cholestérol.
Le sucre qui est à l’origine de beaucoup de désagréments physiques et physiologiques, est présent dans tous les produits jusque-là insoupçonnés (cé- réales, sauces, boissons gazeuses, boites de conserve, repas surgelés….).
Dans la catégorie des produits salés : il y a lieu se méfier du sel industriel, obtenu par raffinage et contenant des additifs parfois toxiques et préparés chimiquement. Il faut lui préférer le sel naturel et non raffiné, obtenu par évaporation de l’eau de mer, sans ajout chimique et sans transformation.
Une consommation excessive de sel représente un risque physiologique avéré (dysfonction rénale, hypertension, enflures, rétention d’eau, complications cardio et cérébro-vasculaires…).
La consommation des produits ultra-transformés et les risques pour la santé ?
Les aliments ultra transformés peuvent avoir un impact négatif sur la santé parce qu’ils contiennent des quantités élevées de gras, de sucre et de sel.
Ils sont, pour une grande partie d’entre eux, remplis d’additifs alimentaires dont la valeur nutritive est proche de zéro (colorants, épaississants, émulsifiants, stabilisants, gélifiants et autres agents conservateurs).
Selon une note de l’office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, dépendant du parlement français, (note N°35 janvier 2023) « plusieurs dizaines d’études épidémiologiques observationnelles ont exploré les associations pouvant exister entre les consommations d’aliments ultra transformés et les risques de maladies chroniques (…….) : surpoids, obésité, diabète de type 2, maladies cardiovasculaires, hypertension, dépression et mortalité toutes causes confondues. (…..) Par ailleurs, les aliments ultra transformés contiennent généralement des additifs variés dont l’impact sur la santé est susceptible d’être délétère sur le long terme. Des études suggèrent que certains additifs pourraient perturber le microbiote intestinal ou le système endocrinien, avoir des effets cancérogènes ou inflammatoires. »
Loin des produits transformés, la cuisine algérienne renferme moult ingrédients naturels (fruits, légumes, épices….).
Elle est à mettre à l’honneur, car elle nous éloigne des produits chimiques de synthèse et des additifs qui font le lit de maladies invalidantes.
La variété de la cuisine algérienne, nous la retrouvons dans l’éventail de plats traditionnels riches et diversifiés.
A titre d’illustration, rien que pour le couscous, il existe une multitude de façons de le préparer, selon les régions : le couscous algérois, le couscous noir de Jijel, le couscous berboucha de Sétif, le couscous abissar de Kabylie, le couscous m’zeyet de Constantine, le couscous maghmouma des Aurès, sont autant de plats naturels qui nous rapprochent de notre identité culturelle, de nos aïeux et de nos valeurs incarnées par la terre de nos ancêtres.
Au titre des aliments sains, on pourrait aussi évoquer les soupes traditionnelles algériennes (chorba, hrira, tchicha, djari) préparées à partir de produits naturels, sans colorants, ni conservateurs : blé concassé, épices, légumineuses, coriandre, safran, origan (zaatar)…
Ce dernier, par exemple, est principalement reconnu pour ses vertus thérapeutiques : antibactérien et anti-infectieux, l’origan sert à lutter contre les germes pathogènes.
Au final, le retour aux sources et à la tradition culinaire de nos parents et de nos grands parents, n’est-il pas notre passeport pour un modèle de santé optimale : un équilibre de bien-être physique, émotionnel, social et spirituel.
Lies HAMIDI
Docteur en droit