L’Algérie fait face à une hausse alarmante de la demande en électricité, portée par les vagues de chaleur successives et la généralisation des climatiseurs. Les chiffres du Commissariat aux énergies renouvelables et à l’efficacité énergétique (CEREFE) sont à l’appui.
Par Akrem R.
En effet, la consommation nationale a atteint 55 millions de tonnes équivalent pétrole (Tep) en 2024, contre 33 millions en 2011, soit une hausse de près de 60 %. Ceci dit, la consommation nationale en énergie a triplé durant cette période et devrait poursuivre cette tendance, d’autant plus que la demande interne progresse de 5 % annuellement. La sonnette d’alarme est donc tirée et des efforts sont en effet à consentir dans différents domaines afin de rationaliser la consommation nationale, en développant de nouvelles sources d’énergies propres notamment.
Lors de son passage sur un plateau de la télévision nationale, Mourad Issiakhem, directeur de l’efficacité énergétique au CEREFE, a expliqué cette hausse de la consommation par des vagues de chaleur exceptionnelles et l’usage massif des climatiseurs.
D’ailleurs, durant cet été 2025, l’Algérie a franchi en juillet 2025 un nouveau pic historique de consommation énergétique, atteignant 20 628 MW le 23 juillet à 14h43, contre 19,5 GW en 2024 et seulement 8 600 MW en 2011 ! «Nous observons une croissance moyenne de 5 % par an, ce qui constitue une véritable alerte», a-t-il averti, en soulignant l’urgence de rationaliser la consommation pour préserver les équilibres énergétiques du pays.
Toutefois, et malgré cette tendance, l’Algérie dispose encore d’une marge de sécurité grâce à une capacité de production de 26 GW, assurée principalement par le gaz naturel, qui représente 99 % du mix électrique. Le pays exporte même une partie de son surplus vers la Tunisie.
«Grâce notamment à Sonelgaz et aux efforts remarquables de ses techniciens, la situation est restée maîtrisée. En 2025, la capacité nationale de production électrique a atteint 26 GW, ce qui a permis non seulement de couvrir la demande interne mais aussi de dégager un excédent exporté principalement vers la Tunisie, contribuant ainsi à renforcer la coopération énergétique régionale», a-t-il détaillé.
En clair, l’Algérie est appelée à mettre en place un nouveau modèle de consommation du fait que l’actuel a prouvé ses limites, dont une part importante de l’énergie consommée, près de 75 %, est absorbée par des usages non productifs (logements, services, transport), tandis que seulement 25 % est orientée vers l’industrie.
L’évolution des modes de consommation explique en grande partie cette pression sur le réseau. Le pic, autrefois observé le soir, survient désormais en pleine journée, coïncidant avec l’utilisation massive des climatiseurs, indique-t-il.
Une stratégie nationale pour rationaliser la consommation
Pour faire face à cette tendance, l’État a multiplié les mesures de rationalisation : subventions aux lampes LED à faible consommation, soutien aux chauffe-eau solaires, programmes d’isolation thermique des bâtiments, incitations à la conversion des véhicules au GPL, et prise en charge de 70 % des audits énergétiques pour les entreprises. L’objectif est clair : réduire de 10 % la consommation énergétique d’ici 2030, soit l’équivalent de 63 000 tonnes de CO₂ évitées.
Face à la hausse continue de la demande, les hautes autorités du pays, en particulier le Président de la République, ont donné en février 2025 des instructions pour promouvoir une consommation rationnelle de l’énergie.
«Car nous avons constaté une croissance soutenue de cette consommation. Dès 2011, l’Algérie a mis en place un programme d’efficacité énergétique et de développement des énergies renouvelables, qui visait, à l’horizon 2020, la production de près de 15 gigawatts d’énergie solaire et une réduction de 10 % de la consommation intérieure», souligne Mourad Issiakhem.
Donc, l’Algérie mise sur un développement massif des énergies renouvelables pour développer un mix énergétique, combinant énergies renouvelables et énergies fossiles, principalement le pétrole.
Avec plus de 3 000 heures d’ensoleillement par an, le pays dispose d’un potentiel solaire immense. Actuellement, 650 MW sont installés, mais un projet de 3,2 GW est en cours, avant d’atteindre 15 GW à l’horizon 2035. Indiquant que le réseau électrique algérien est un réseau « propre », puisque 99 % de la production provient du gaz.
«Nous disposons seulement de 1 % d’énergies renouvelables, mais l’Algérie mène actuellement de grands projets pour aller de l’avant dans ce domaine», a-t-il dit, affirmant qu’un vaste programme d’efficacité énergétique et de rationalisation de la consommation d’énergie est en cours.
L’éolien et le biogaz complètent cette stratégie. Un projet pilote de valorisation des déchets à Ouedsmar permet déjà de produire de l’électricité à partir du biogaz, une première en Algérie, avec une capacité de 637 kW.
Développement d’une industrie locale
Au-delà de la production, l’Algérie ambitionne de bâtir une industrie locale des énergies propres. Plusieurs usines de fabrication de panneaux solaires sont déjà en activité, capables de répondre aux besoins des grands projets. Des investisseurs étrangers, notamment chinois, s’intéressent à la production de verre solaire et d’onduleurs en Algérie.
Le pays mise également sur l’innovation. Une valise énergétique portable, inventée par un chercheur algérien, a récemment été mise en avant pour son potentiel à alimenter un foyer en électricité.
Ces efforts s’inscrivent dans un contexte marqué par le changement climatique, dont les effets sont déjà visibles en Algérie : vagues de chaleur dépassant les 60 °C dans le Sud, inondations récurrentes et dérèglement des saisons.
«La rationalisation de la consommation et le développement des énergies renouvelables ne sont pas seulement des choix économiques, mais aussi une nécessité environnementale et stratégique», a indiqué Issiakhem, en rappelant qu’à partir de 2026, une taxe carbone aux frontières sera appliquée, touchant les secteurs les plus énergivores tels que le ciment, l’ammoniac, la sidérurgie, l’aluminium et l’électricité.
Cette mesure vise à inciter les industriels à réduire leurs émissions de CO₂ et à investir dans des solutions plus propres.
Avec plus de 20 cimenteries et un secteur sidérurgique en pleine expansion, l’Algérie mise sur la modernisation de ses usines afin de rationaliser la consommation énergétique, réduire les émissions de gaz à effet de serre et garantir la sécurité énergétique du pays.
A.R.
Recherche scientifique : Lancement d’un projet de fabrication d’un moteur à hydrogène vert
Le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, M. Kamel Baddari, a supervisé, dimanche à Alger, le lancement d’un projet de fabrication d’un moteur à hydrogène vert, indique un communiqué du ministère.
Ce projet « s’inscrit dans le cadre de la valorisation des résultats de la recherche et du développement et de la transformation de l’innovation en résultats valorisables et industrialisables, à travers la conversion des moteurs diesel des bus de transport en moteurs fonctionnant à l’hydrogène vert », précise le communiqué.
Ce projet « permettra d’économiser 31% de la production énergétique locale et de réduire considérablement les émissions de carbone liées à l’utilisation du diesel, contribuant ainsi à la réalisation des objectifs de développement durable fixés dans le programme du gouvernement 2024-2029 », selon la même source.
Le lancement de ce projet « s’est déroulé en présence de représentants du ministère de la Défense nationale et de la Direction centrale des fabrications militaires, du directeur général de la recherche scientifique et du développement technologique, de la directrice de l’Ecole nationale supérieure des énergies renouvelables, des directeurs des centres de recherche, de chercheurs dans le domaine de l’hydrogène vert, ainsi que de représentants de la Société nationale des véhicules industriels (SNVI) ».
R.N.