La problématique de la sécurité alimentaire constitue un axe stratégique majeur dans les grandes décisions économiques de ces dernières années. Le président de la République vient de la réitérer à l’occasion de la célébration, mardi dernier, du 50e anniversaire de la création de l’Union nationale des paysans algériens (UNPA). Il dira, en substance : « Notre pays a fait de la sécurité alimentaire un pari stratégique que nous devons relever dans un monde où l’alimentation constitue désormais une arme redoutable et hautement influente».
Par Amar Naït Messaoud
Ainsi, l’agriculture bénéficie de l’intérêt de plus en plus accru des pouvoirs publics, non seulement à travers les soutiens classiques aux intrants et à la prise en charge de la production de certaines filières, comme les céréales et, plus récemment, les oléagineux, mais également par le moyen de l’extension de la surface agricole utile (SAU), par le truchement de la mise en valeur de nouveaux périmètres de concession, et de l’extension de périmètres irrigués.
La superficie des exploitations agricoles irriguées en Algérie est de 1,5 millions d’hectares, ce qui représente 17 % de la SAU.
Jusqu’au début du nouveau siècle, cette superficie ne dépassait pas les 350 000 hectares.
Ce capital des surfaces irriguées sera désormais renforcé par les nouveaux investissements agricoles projeté dans le sud algérien, principalement dans les cultures céréalières, oléagineuses et fourragères, en partenariat avec des organismes étrangers (Qatar, Italie).
La différence avec les superficies irriguées du Nord réside dans l’origine de la ressource hydrique.
Dans les territoires traditionnels de l’agriculture, l’eau est issue des barrages hydrauliques ou parfois de forages réalisés dans des nappes phréatiques. Ici, l’eau est d’origine pluviale, donc sujette à des fluctuations de volume selon les changements climatiques en cours.
Au Sahara, l’eau, majoritairement non renouvelable, est puisée de la nappe relevant du Système aquifère du Sahara septentrional (SASS), commun à l’Algérie, la Tunisie et la Libye, s’étendant sur un million de kilomètres carrés.
Évidemment, cette nappe, d’un volume gigantesque, est sous la surveillance de scientifiques pour tendant à asseoir une politique rationnelle de son exploitation et des conditions de salubrité de son utilisation.
Le sujet de l’agriculture conduite en irrigué réapparaît au sein de l’administration et des services techniques, comme elle occupe une large place dans les médias, à chaque fois que le ciel commence à faire preuve de parcimonie en matière de précipitations, comme c’est le cas depuis quelques semaines, alors que la campagne de labours-semailles est déjà lancée depuis le mois d’octobre.
Les limites de l’agriculture pluviale
Visiblement, la conduite des différentes cultures souffre des aléas climatiques, lesquels, principalement depuis quelques années, ont affecté la répartition calendaire des précipitations.
De façon presque cyclique, la période de reprise végétative et de croissance des plantes, correspondant à l’intervalle mars-mai, se voit privée de précipitations. Ce qui impacte négativement les rendements agricoles.
L’année passée, c’est le début de la campagne agricole qui a été pénalisé entre septembre et décembre. Ce n’est qu’au milieu du mois de décembre que des précipitations ont été enregistrées.
En tous cas, l’agriculture pluviale- qui se base sur les seules précipitations du moment pour l’irrigation- a largement atteint ses limités, non seulement en Algérie, mais dans toute la région méditerranéenne et le Moyen Orient.
La solution réside donc dans la mobilisation des eaux de surface par leur stockage dans des barrages et des retenues collinaires, l’exploitation rationnelle des nappes du nord du pays par le moyen de forages et de puits, l’utilisation des eaux usées ayant bénéficié du procédé d’épuration et l’utilisation maximale des techniques et technologies destinées à assurer l’économie de l’eau.
Avec l’effort de mobilisation des eaux de surface, à travers la construction de plusieurs barrages, il est attendu que la politique agricole suive cette avancée et profite de manière intelligente des disponibilités hydriques.
Une étude effectuée par le Bureau national des études en développement rural (BNEDER) a montré que l’Algérie recèle des possibilités d’extension qui peuvent aller jusqu’à 2,2 millions d’hectares.
Ce potentiel d’extension est directement lié aux investissements consentis depuis le début des années 2 000 dans la mobilisation des eaux de surface à travers les barrages hydrauliques et aux dispositifs de transfert inter-régions.
Raccordement à l’énergie et économie de l’eau
L’agriculture quasi exclusivement pluviale, telle qu’elle était menée jusqu’à la fin des années 1990, a montré ses limites face aux exigences de la sécurité alimentaire de plus de près de 48 millions de consommateurs.
La première phase du processus visant à faire sortir l’activité agricole de la dépendance excessive par rapport au volume et à la répartition des pluies- trop aléatoires sous le climat méditerranéen- a été une opération initiée par le ministère de l’Agriculture sous le nom de « reconversion des systèmes de culture » et consistant à remplacer progressivement les emblavures en céréales dans les régions semiarides affectées par une sécheresse chronique, principalement dans la steppe, par la plantation d’arbres rustiques, peu exigeants en eau (olivier, amandier, figuier,…) et par les plantations pastorales à même de fournir un complément d’offre fourragère pour les troupeaux ovins des régions steppiques estimés à quelque 27 millions de têtes.
Cette tendance a été poursuivie, particulièrement avec les grands programmes de plantations oléicoles qui ont donné une envergure inédite à l’olivier, au-delà même de son aire écologique classique, investissant les Hauts Plateaux et quelques régions du Sud, comme la wilaya d’El Oued.
Parallèlement à cet engouement vers l’arboriculture, soutenue financièrement par l’État, de nouveaux périmètres irrigués ont été conçus à la périphérie des barrages hydrauliques construits au cours de la dernière décennie.
Afin que ces potentialités puissent s’inscrire dans la durée et acquièrent une efficience, les experts recommandent une utilisation rationnelle de l’eau. D’où, la notion des systèmes d’irrigations économes en eau.
Les surfaces agricoles irriguées par des systèmes économes en eau sont évaluées à quelque 700 000 hectares, soit presque la moitié de l’ensemble des superficies irriguées.
Il y a lieu de rappeler que les efforts d’accroissement des surfaces irriguées a été rendus possibles par la grande dynamique, déployée au cours de ces trois dernières années, de raccordement des exploitations agricoles au réseau d’alimentation en énergie électrique.
L’impérative nécessité d’aller vers une utilisation rationnelle de l’eau d’irrigation, et ce, par le moyen de la modernisation des équipements techniques, l’introduction des méthodes modernes portées sur l’économie de l’eau et le renforcement de l’option du système d’irrigation collectif, requiert un travail de sensibilisation et de vulgarisation que mènent de concert les deux département ministériels directement concernés par cette activité, à savoir le ministère des Ressources en eau et le ministère de l’Agriculture.
A. N. M.