Avec la nouvelle dynamique impulsée à la diversification de l’économie nationale (production brute dans tout son éventail, transformation et exportation), au chantier de la numérisation et à la politique de l’habitat dans ses différentes déclinaisons, l’Algérie se met dans la position d’une exigence plus grande en matière d’encadrement administratif de toutes ces missions. Le concept d’administration est ici entendu au sens fonctionnel le plus large, combinant la ressource humaine, la qualification du personnel, la logistique, les mécanismes d’articulation entre les structures techniques et les structures administratives et entre le personnel administratifs et les élus, et enfin, l’articulation spatiale de l’action administrative (déconcentration/décentralisation).
Par Amar Naït Messaoud
La réflexion sur un sujet aussi majeur dans la vie de la nation semble gagner en opportunité et en légitimité lorsqu’on considère les promesses du président de la République données au cours de la dernière campagne électorale pour les présidentielles du 7 septembre dernier dans plusieurs wilayas du pays.
Le thème qui a cristallisé la plus grande attention étant la nouvelle division administrative du pays, il n’en demeure pas moins qu’un tel projet charrie avec lui son corollaire de réorganisation administrative, de redéploiement des structures, de demande, émanant de la société, relative à un surcroît de décentralisation et de rapprochement effectif de l’administration du citoyen.
C’est là, en quelque sorte, la partie la plus visible- la plus proche des populations- d’une vision plus large devant concerner la réforme de l’administration dans tous ses segments.
Certains services publics liés directement à la prestation de l’administration de l’état ont subi une certaine amélioration, particulièrement en matière de délais d’établissement ou de livraison de certaines pièces administratives ou d’état civil.
Cela a commencé avec les initiatives prises sous l’impulsion de l’ex-ministère à la Réforme des services publicsdisparu depuis lors du l’organigramme gouvernemental- et a continué au niveau du ministère de l’Intérieur, des Collectivités locales et de l’Aménagement du territoire.
S’agissant précisément de l’état civil, la conjugaison des efforts entre le ministre de l’Intérieur et le ministre des Affaire étrangères a pu aboutir à la connexion de tous les consulats algériens à l’étranger avec le fichier d’état civil national.
C’est là une avancée notable dans ce qu’a classé comme mission de lutte contre la bureaucratie.
Bien évidemment, cette mission, deal clamé depuis des années, ne peut pas, néanmoins, se limiter à la délivrance de pièces d’état civil.
Au temps même du ministère à la Réforme administrative, il a été fait un inventaire non exhaustif des pièces et procédures qui entravent la bonne marche des services publics, aussi bien par le temps d’établissement de certains actes, jugé excessif, que par la qualité des services rendus.
Des prestations de l’ADE jusqu’aux services de Sonelgaz, en passant par les impôts, le cadastre, la conservation foncière, le dossier de l’habitat rural, les demandes de soutien aux différents fonds de l’agriculture, et d’autres services encore, le parcours du combattant est souvent au rendez-vous pour les citoyens.
DE LA PERFORMANCE À INJECTER DANS LES SERVICES COLLECTIFS
Sur un autre plan, en focalisant les observations et la réflexion sur le niveau et la qualité des services que l’administration fournit aux citoyens sous la forme individuelle, l’on a tendance à occulter les autres prestations dues à cette même administration réalisées dans le cadre de la vie collective.
Cela commence par les services de nettoyages et d’hygiène de la mairie jusqu’aux programmes d’équipements publics dont l’APC, les différentes directions de wilaya et d’autres établissements publics sont maîtres de l’ouvrage.
Si l’on prend, à titre d’exemple les programmes d’équipements budgétisés dans les lois de finances, c’est à l’administration publique, constituant les différents démembrements de l’État, qu’ils sont confiés.
Leur réalisation- selon les normes techniques et les délais réglementaires- dépendent étroitement du suivi et du contrôle de l’administration qui a confectionné les cahiers de charges, comme ils dépendent également de la performance des bureaux d’études et des entreprises de réalisation engagés.
De la performance et de la discipline de ces deux parties dé- pendent étroitement la qualité des ouvrages (infrastructures et équipements) livrés à la collectivité. Indubitablement, c’est là un chapitre de poids qui dépasse de loin les griefs qu’on lance habituellement à l’administration au sujet des lenteurs de la délivrance de certaines pièces administratives ou d’état civil. Même le niveau de corruption subit la loi de cette proportionnalité.
Plus les projets son consistants sur les plans du volume et du montant financier, plus le risque de concussion est plus grand.
Avec le départ en retraite anticipée de dizaines de milliers de fonctionnaires, de la fin des années 1990 et jusqu’à 2016, parfois à peine quinquagénaires, la question de la relève se pose avec une acuité inouïe.
Avec près de trois millions de fonctionnaires, la fonction publique, montre un certain degré de saturation depuis au moins les cinq dernières années.
Des centaines de milliers de cadres en pré-emploi lui sont affectés (la dernière opération d’intégration effectuée en deux tranches à partir de 2019 a porté sur un effectif de 450 000 pré-emplois). La relève, supposée être réalisée par les nouveaux diplômés de l’université- titulaires ou pré-emploi- pose la problématique de la transmission des expériences qui n’a pas toujours le temps ou l’opportunité de se réaliser.
MIEUX ENCADRER LES INVESTISSEMENTS
Un premier diagnostic a été réalisé au début des années 2000 par la commission des réformes de l’État et de ses missions, présidée par feu Missoum Sbih, un haut fonctionnaire de l’État, ancien directeur générale de la Fonction publique et qui était resté longtemps directeur de l’École national d’administration. La commission avait fait un diagnostic sévère de l’administration publique dans toutes ses déclinaisons.
Personnel, institutions, organigrammes et gestion du territoire, aucun de ces paramè- tres n’est épargné par l’analyse critique de cette commission.
Il est fait alors état de la faiblesse du niveau de formation des agents de l’État, de leur tentation corruptrice, de la médiocrité des prestations, de la centralisation excessive des institutions et des centres de décision, et, enfin, de la mauvaise division du territoire national.
Un grand nombre de points développés dans le rapport de la commission- dont les problématiques gardent touours leur validité- peuvent être mis aujourd’hui sur la table, d’autant plus que la situation semble mûre pour un examen apaisé, par des experts nationaux et des élus, en impliquant le Conseil national économique, social et environnemental (CNESE).
Outre le rehaussement du niveau et de la qualité des services assurés aux citoyens- en tant qu’individus et en tant que collectivité-, la réalisation de l’équilibre régional, l’optimisation de l’aménagement du territoire, la réforme de l’administration sera d’un apport considérable pour l’encadrement des investissements et de l’économie à travers la modernisation et l’accélération des procédures de l’accès au foncier, du calcul fiscal et des avantages y afférents, de la gestion des zones industrielles et des zones d’activité et du suivi de l’impact environnemental des établissements classés.
A. N. M.