La levée de l’interdiction de fréquentation des plages a généré une affluence particulière des estivants privés de bol d’air marin et de leurs lieux de baignade, durant une bonne partie de l’été pour cause de pandémie. Si certains, par anticipation, ont pris leurs dispositions pour louer leurs chambres d’hôtel et autres lieux de vacances, la majorité de nos concitoyens n’ont pas eu ce réflexe, et ont dû, donc, subir bien des désagréments…
Par Réda Hadi
Alors qu’avant le 15 août, les offres pour des locations étaient nombreuses et abordables, il en a été tout autrement après cette date.
Dès le 15 août, en effet, les offres ont connu une flambée jamais égalée. La moindre parcelle pour installer une petite tente vaut une fortune. Il en est de même pour les appartements en bord de mer, qui se louent aisément entre 12 000 et 25 000 DA la nuitée. Dans les complexes privés, les choses ne valent guère mieux. Les chalets sont au prix de 1 2000 et 14 000 DA la nuitée en fonction de la superficie.
Une journée de détente hors de prix !
Pour ceux qui n’ont pas les moyens de s’offrir des vacances en location, il ne reste alors que le plaisir de passer une journée en bord de mer, mais à quel prix !
Nous avons pris l’exemple d’Ahmed, père de 3 enfants, et dont le revenu est de 52 000 DA. Sans voiture, il a dû donc en louer une sur les plates-formes Yassir, ou Tem tem.
Pour une «course» vers le littoral de Boumerdès, il lui a fallu débourser environ 3 000 DA, en aller et retour.
A cette lourde dépense, déjà pour son budget, il a fallu compter les prix des achats nécessaires pour la journée, d’autant qu’Ahmed n’ayant pas voulu la gâcher à ses enfants, s’est permis quelques extras. Une enveloppe de 3000 DA, là encore… Puis, une fois sur les lieux de détente, la location d’un parasol et de 4 chaises lui vaudra 1 200 DA.
«Je suis obligé de venir à Boumerdès où les plages sont moins encombrées, celles d’Alger étant saturées. Cela me revient très cher», affirme Ahmed, «mais je suis obligé d’offrir à mes enfants, ne serait-ce qu’une journée à la plage.»
«Vivant dans un F3 à Aïn Naâdja, le confinement a été une souffrance pour toute la famille. Respirer un peu ça fait du bien», avoue-t-il.
Mais une journée de détente au prix de 7 200 DA minimum, n’est pas un plaisir qu’il compte renouveler de si tôt.
Des prix aberrants, sans aucune retenue
Sur toute la côte algérienne, la mi-août a été le début d’une augmentation effrénée des prix.
Sur la côte ouest, à la Salamandre dans la wilaya de Mostaganem, les prix des studios en bord de mer varient entre 10 000 et 13 000 DA la nuitée, alors que pour un appartement, il faut débourser entre 14 000 et 18 000 DA par jour.
A Oran, les prix sont identiques, à croire que tous les propriétaires se sont donné le mot pour afficher la même mercuriale.
Des prix, qui plus est qui ne garantissent nullement une prestation, au moins correcte. En fait, il n’y en a aucune. Le bailleur garantit le toit, l’électricité et l’eau, mais en cas de coupure, par exemple, celui-ci ne s’en sent pas responsable, le courant étant raccordé… au réseau public.
Pire encore, toutes ces locations se font en dehors de tout cadre légal et sans aucun contrôle. En Airbnb à l’algérienne, elles se font négocier sur Facebook et sans aucun encadrement juridique, d’où les arnaques qui se sont multipliées sans aucune possibilité de plainte. Sur la côte ouest et centre, par ailleurs, la pression est si forte à cause des réservations de dernière minute, que cela a fait flamber les prix.
Les complexes privés profitent de la situation
Que cela soit à l’Ouest ou au Centre, les complexes privés rivalisent dans l’augmentation des prix.
A titre d’exemple, dans la wilaya de Boumerdès, dans la localité de Sghirat, le moindre des petits bungalows se négocie aux alentours de 6 500 DA la nuit.
Dans un complexe privé sur la même plage, un deux-pièces aménagé en chalet de 30 m2 ne vaut pas moins de 12 000DA. Ceci sachant qu’outre la location, il faut compter avec les dépenses journalières et les extras, propres aux séjours estivaux.
Sid-Ali, qui a loué pour une dizaine de jours dans ce complexe, avoue que le fait de n’avoir pas sacrifié de mouton à cause de la Covid-19, ainsi que «grâce» au report de la rentrée scolaire, cela lui permet de se payer quelques vacances… C’est dire !
«Les prix sont excessivement élevés et les prestations ne suivent pas. Les coupures d’eau sont fréquentes, ce qui nous oblige à nous approvisionner en eau minérale, mais aussi en eau de citerne, avec les risques d’allergies qui peuvent en découler».
A l’intérieur du complexe, les prix sont excessifs et tout est fait pour rattraper une saison annoncée morte.
«Cet été, je n’étais pas sûr de travailler, mais dès qu’on a autorisé l’ouverture des plages, le patron a été submergé de demandes de dernière minute. J’ai vu des gens supplier pour un bungalow et renchérir, même sur le prix pour l’obtenir ! », confie Omar, un jeune serveur.
La demande est trop forte en cette période de canicule, et les offres se sont amoindries aussi.
Pourtant encore plus à l’Est, la situation prête tout de même à l’optimisme.
La côte de Béjaïa plus abordable
Paradoxalement, la côte est de Béjaïa n’a pas connu de flambée brutale. A Souk El Thénine, Melbou, Cap Aokas, en effet, les prix sont restés au même niveau que la saison passée.
Une maison d’un particulier à 300 m de la plage est louée entre 4 000 et 6 000 DA la nuit.
Un commerçant de Melbou nous explique que les estivants ne viennent des wilayas limitrophes, que pour la journée. Ce ne sont que ceux qui arrivent de régions comme Biskra, Oued Souf et des autres plus au Sud qui louent, ce qui explique que la demande n’est pas très forte.
En ce qui concerne Tichy, les prix sont aussi équivalents que ceux du Centre et de l’Ouest, du fait de la notoriété de la région, subissant une forte pression.
Tout le monde veut en profiter !
Ainsi donc, cette saison estivale rendue extrêmement courte à cause du confinement durant une partie de l’été, beaucoup ont décidé d’en tirer profit au maximum.
A commencer par les commerçants des bords de la mer, qui ne se privent pas de majorer leurs prix sans le moindre scrupule.
A Souk El Thénine, la bouteille d’eau minérale est vendue 35 DA, et 50 DA si elle est glacée ou très froide. Le paquet de chips de 15 DA est cédé à 25 DA.
La baquette de pain sous prétexte de pénurie et revendue 15 DA et monte à 20 DA le soir ! Pratiquement, les prix de tous les produits courants à grande consommation ont connu une hausse.
D’autres exploitent leurs enfants. On les retrouve, ainsi, sur les bords de la route menant aux plages et vendant sous un soleil de plomb, qui des fruits de vergers, qui du pain et autres accessoires de plage.
A Boumerdès, et c’est connu de tous, sur la grande route de la sablière, les enfants se mettent au beau milieu de la chaussée et vous proposent des l’eau glacée, et beaucoup n’hésitent pas à s’arrêter pour en acheter, provoquant de grands encombrements, sans parler de la sécurité de ces enfants.