Les mesures législatives et la nouvelle politique de développement économique, mises en œuvre par les pouvoirs ces deux dernières années afin d’améliorer le climat des affaires et encourager l’investissement sur le marché national, suscitent un réel enthousiasme au sein des milieux économiques étrangers, y compris parmi ceux qui ont été des plus sceptiques antérieurement. Parmi ces derniers, ce sont les milieux d’affaires français qui affichent de plus en plus des ambitions remarquables pour le marché algérien et les opportunités qui s’y offrent.
Par Mohamed Naïli
La raison ? Les nouveaux textes de loi promulgués ces derniers mois et la nouvelle politique économique mise en œuvre selon les orientations du chef de l’Etat, Abdelmadjid Tebboune, axée sur la diversification de l’économie et des sources de revenu pour sortir de la dépendance aux exportations pétrolières.
« Les autorités algériennes martèlent en effet leur volonté de développer la production locale en ouvrant les portes du pays aux investisseurs étrangers », ce sont là les termes qui ressortent des observations de nombreux chefs d’entreprises et responsables économiques de l’Hexagone interrogés dans le cadre d’une enquête publiée hier par le quotidien économique Les Echos, sous le titre « Climat des affaires : La nouvelle donne algérienne », en faisant remarquer que « l’année 2019 a marqué un tournant avec l’abrogation de la fameuse loi du « 51-49 ».
Regrettant, sans le dire ouvertement, le temps perdu et les parts de marché dont se sont emparées des concurrents chinois ou turcs, le directeur général de la PME Générale Energie, Nicolas Pereira, dont l’entreprise est « spécialisée dans la rénovation énergétique et est arrivée en Algérie en 2019 pour installer des panneaux solaires », reconnait que, « nous, les Français, ne connaissons pas l’Algérie (…) on s’y intéresse peu et on en a peut-être une image fausse. »
Confirmant le scepticisme qui caractérisait les chefs d’entreprise français dans un passé récent, le DG de Générale Energie reconnait aussi que sa PME « n’aurait probablement pas tenté l’aventure si son président, franco-algérien, n’avait pas connu un partenaire de confiance dans le pays (en Algérie, ndlr). Et pourtant, c’est un pays qui va vite, une fourmilière qui ne manque pas de projets », avant de révéler que, en guise de projets futurs, « on vise aujourd’hui un projet plus grand dans l’olive (…). On peut faire de l’huile, du biocarburant, de la nourriture pour des bovins… ».
Au sein de la Chambre de commerce algéro-française, l’amélioration du climat des affaires en Algérie est actée. En effet, pour le président de cette dernière, Michel Bisac, « une entreprise qui veut venir ici (en Algérie en l’occurrence, ndlr), qui s’en donne les moyens, qui est bien conseillée, n’a quasiment pas de concurrence. Tous les domaines sont ouverts ».
Des atouts mis en exergues
Ce que confirme aussi le directeur de l’antenne algérienne du bureau Business France, Romain Keraval, qui lance à l’endroit des hommes d’affaires de l’Hexagone, « si vous vous accrochez, c’est un pays dans lequel vous réussirez », en leur parlant du marché algérien.
Même au sein du groupe français Sanofi, spécialisé dans l’industrie pharmaceutique, c’et le même optimisme quant aux évolutions qu’observe l’économie nationale engagée désormais dans la voie de la diversification et l’amélioration du climat des affaires qui y prévaut. Et pourtant, le groupe en question, installé en Algérie depuis plusieurs années est actuellement mis en demeure par les pouvoirs publics afin de clarifier sa démarche pour le projet de production d’insuline qu’il compte réaliser à Alger.
Selon le directeur de la division Médecine Générale au sein de ce groupe, Olivier Charmeil, « il faut être très déterminé. On continue à travailler avec les autorités algériennes qui sont désireuses de trouver une solution » pour le malentendu sur l’importation d’une chaine de production de l’insuline. Le motif ? Sur le site de Sidi Abdellah, à l’ouest d’Alger, ouvert en 2018 et où le groupe produit déjà « des médicaments sous forme solide, comme le Doliprane et des hypertenseurs », Sanofi a projeté une unité de production d’insuline. Néanmoins, « la ligne de production qu’il veut importer a déjà été utilisée pendant quatre ans, alors qu’Alger ne dédouane que celles n’ayant jamais servi ».
En guise d’argument motivant son optimisme quant au dénouement de cette situation, le représentant de Sanofi fait allusion à l’utilité de ce projet qui « répond aux besoins du patient algérien, mais aussi à la volonté d’Alger de produire localement avec des transferts de technologie et de compétences ».
Outre la stabilité qui caractérise depuis quelques années le marché national, les milieux d’affaires de la rive nord de la Méditerranée mettent en avant aussi la multitude d’atouts dont jouit l’Algérie et qui représentent de réelles opportunités d’investissement pour les opérateurs économiques. « L’Algérie, grande comme quatre fois la France, aligne des atouts indéniables : sa proximité avec l’Europe au moment où l’on cherche à relocaliser les chaînes de production, ses bonnes infrastructures de transport vers le reste du continent africain, ses coûts énergétiques extrêmement faibles (16 fois inférieurs à ceux de la France, selon la chambre de commerce algéro-française), une main-d’œuvre formée et peu coûteuse, une bonne couverture électrique et Internet, des filières encore entièrement vierges », énumèrent-on dans les sphères économiques parisiennes.
Donnant sa lecture du climat des affaires en Algérie, l’économiste Alexandre Kateb, fondateur du service de prospective The Multipolarity Report, lui, note qu’« aujourd’hui, l’Algérie est en position de force. Le gouvernement veut capitaliser sur la dynamique dans les hydrocarbures pour redonner de l’oxygène à son économie et, à plus long terme, accélérer sa diversification ». En réponse à ceux qui affichent encore des appréhensions invoquant de prétendues difficultés bureaucratiques ou bancaires, l’économiste relativise : « Toutes ces difficultés sont relatives si on les compare au potentiel du marché algérien. C’est le calcul fait par tous les grands groupes qui s’y installent : c’est un investissement qui doit se faire dans la durée ».
M. N.