L’accord Algérie-UE, souvent décrié, mais jamais remis en cause, n’en demeure pas moins un point sur lequel les économistes algériens ont souvent exprimé des réserves, le jugeant plus favorable à l’Union européenne. Une thèse accréditée par les pouvoirs publics, qui ont annoncé en décembre, que la balance commerciale des échanges, penche largement vers ce partenaire avec plus de 310 milliards de dollars de marchandises vendues, pour 15 milliards de dollars de produits algériens, hors hydrocarbures. Il n’en fallait pas plus pour beaucoup, pour relever que cet accord n’était qu’un leurre, car la zone de «prospérité partagée» censée avoir été mise en place dès 2017 (en vertu dudit accord conclut en 2002 aux termes de 5 ans de «négociations »), désavantage l’Algérie.
Par Réda Hadi
Pourtant, cet accord a ses adeptes qui jugent que l’Algérie peut en tirer parti. Des experts algériens ont, à ce propos, préconisé lors d’un séminaire qui les a réunis à Alger, que «le dialogue entre l’Algérie et l’Union européenne (UE), doit se tenir en vue d’en tirer le plus de bénéfices»
Lors de ce séminaire, organisé par l’institut National d’études de stratégie globale (Inesg), ces experts ont souligné «la nécessité d’étudier objectivement les failles et les lacunes de la stratégie suivie jusque là dans les négociations sur l’accord d’association avec l’UE».
Les experts présents, soulignent donc, la nécessité de rattraper le coche, en exploitant les failles de cet accord et en tirer profit. Les intervenants ont souligné, en effet, que l’accord en question présente «beaucoup de point positifs que l’Algérie est en mesure d’exploiter»
Loin de faire l’unanimité, cet accord, dont la gestion des négociations est remise en cause, a souvent soulevé des polémiques de la part des antagonistes à qui soulignent que le démantèlement tarifaire mis en œuvre avec l’UE a, en 15 ans, fait perdre au Trésor public pas moins de 30 milliards de dollars de recettes.
En 2016 Bakhti Belaib, ex-ministre du Commerce, soit moins d’une année avant sa disparition (janvier 2017), lorsqu’interpellé, en marge d’un séminaire international dédié à la promotion des exportations hors hydrocarbures, tenue à Annaba, il avait déclaré, à des confrères : «Je ne connais pas un pays au monde qui accorde des facilités déconcertantes pour les commerçants étrangers, lesquels (commerçants) sont devenus des relais pour les exportations de leur pays d’origine.» .
C’est dire que la suspicion sur cet accord venait du plus haut rouage de l’Etat.
Des observateurs soulignent, eux aussi, que dans l’esprit de cet accord, les services censés aider à l’export sont absents. «Et même si on libère l’acte d’exporter de toutes les contraintes, l’environnement ne s’y prête pas. Il n’est pas coopératif. Nous avons entretenu une culture plutôt orientée vers l’importation», nous dit M. Sayoud, expert en investissement.
Tout de même du positif…
En dépit de toutes les critiques, cet accord est il vraiment défavorable à l’Algérie ?
Peut être pas, car lors de ce séminaire, le directeur des relations commerciales bilatérales à la direction générale du commerce extérieur au ministère du Commerce, Derradji Samir, insiste «sur la nécessité de profiter des avantages octroyés par l’Accord d’association Algérie-UE ». Afin de réussir la diversification de l’économie algérienne, il précise «qu’il faut surtout attirer suffisamment d’investissements direct étrangers (IDE) et de bénéficier de l’apport du savoir-faire étranger, comme le prévoit l’accord lui-même».
Pour la partie européenne, «les relations entre l’Union européenne et l’Algérie se sont vues renforcées au cours des deux dernières années» peut-on lire dans le dernier rapport sur l’état des relations UE-Algérie.
Johannes Hahn, Commissaire à la politique européenne de voisinage et négociations sur l’élargissement, soutient, quant à lui, que « l’UE réitère son soutien à l’Algérie dans son processus de réformes politiques et macroéconomiques structurelles, récemment engagées, qui permettront aussi de resserrer les liens qui unissent nos peuples».
L’Algérie veut revoir l’Accord
Pourtant, même en septembre 2020, la mise en place est reportée sine die par l’Algérie qui veut une révision globale de cet Accord signé dans la précipitation sans consultations des opérateurs économiques et des experts, en avril 2002 à Valence, en Espagne.
Abdelmadjid Tebboune, lui-même avait déclaré, lors d’un entretien télévisé en Septembre 2020, que « nous allons établir un nouveau calendrier avec l’Union européenne, mais, nous n’allons pas annuler l’Accord d’Association. Il faut le réviser. L’UE est d’accord pour cette révision et est prête pour de nouvelles rencontres. Nous devons accélérer ce processus. C’est une affaire de spécialistes. Pour le principe, nous sommes des associés de l’UE mais pas au détriment de notre économie » affirme-t-il. Loin de rejoindre les thèses des détracteurs, le Président aura, néanmoins, reconnu que cet accord ne joue pas en notre faveur. R.H.