Avantages et inconvénients de l’accession de l’Algérie à l’Organisation mondiale du commerce (Omc), dans une conjoncture de compétitivité internationale, de révolution numérique, de crise climatique, de taxes carbone, de faiblesse de l’apport des pays en voie de développement au marché international (estimé à 4%), d’infimes exportations algériennes hors-hydrocarbures, d’absence de puissants négociateurs Algériens, de réforme attendue de l’Omc depuis 1995.
Autant de préoccupations et bien d’autres, autour desquelles s’est articulé le séminaire «L’Algérie et l’Organisation mondiale du commerce (Omc): quel avenir?», organisé, hier, à l’Ecole supérieure d’hotellerie et de restauration de Ain Bénian (Eshra d’Alger), par le Conseil national économique, social et environnemental (Cnese), animé par des experts nationaux et internationaux.
Par Zoheir Zaid
Parmi les objectifs de cette recontre, le Cnese cite: «La réflexion sur l’accession de l’Algérie à l’Omc, notamment, dans le cadre de la relance économique et des réformes sectorielles entamées par les pouvoirs publics», «Les acteurs économiques nationaux doivent évoluer en harmonie avec les standards universels, sans recours à la manne financière de l’Etat».
Il a également été recommandé, concernant l’Afrique, que ses pays intensifient le commerce intra-africain rentrant dans les objectifs de croissance économique et de développement durable, et d’appuyer les réformes par les régles de la transparence, l’accroissement de la compétitivité et l’attractivité des investissements étrangers.
Le président du Cnese, Rédha Tir, a indiqué que «l’Algérie qui a signé beaucoup d’Accords d’associations, notamment avec l’Union européenne (UE), Zlecaf, Gzale, devrait penser à accéder à l’Omc, car ces accords s’inspirent de cette dernière. D’autant que notre pays n’a rien à envier aux pays africains et maghrébins, particulièrement en ressources naturelles et humaines. D’ailleurs, c’est ce qui nous a, d’ailleurs, incité à accélérer la réflexion sur l’impératif de passer à l’étape de l’accession à l’Omc.»
Redha Tir a déclaré que le commerce mondial a triplé durant les 25 dernères années, que des obstacles au commerce sont tombés, et que le décollage économique doit se baser sur la technologie et le capital, particuliérement, le capital privé. Il a également signalé que l’Afrique représentera, en 2050, le quart de la population mondiale. Actuellement 9 de ses membres, dont l’Algérie, ne sont pas membres. L’abondance des ressources du continent, favorise sa position de pole d’attraction des Investissements directs étrangers (IDE).
«Il faut que l’appareil productif, public et privé, créateurs de richesses et générateur d’emplois, explose.», a-t-il également lancé.
Abordant l’impact de la Covid-19 sur le commerce international, le président du Cnese a révélé, citant des données publiées, que «la contraction du commerce mondial s’est établie en 2020.»
Enfin, Tir a tenu à préciser que le Cnese n’est qu’un organe consultatif, la décision de l’accession à l’Omc relève des prérogatives des pouvoirs publics, sur des bases économiques et de droit international.
A souligner que ce séminaire du Cnese s’inscrit dans le cadre d’une série de rencontres-débats entamés le 18 mai 2021.
Ils ont déclaré:
Le chef de la Section de l’économie bleue à la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique, Dr Nassim Oulmane:
«Avantages et inconvénients de l’adhésion à l’OMC.»
«Les avantages de l’Algérie pour accéder à l’OMC, sur les plans de la fonction normative et de la diplomatie économique, lui permettent de participer à l’élaboration des règles commerciales mondiales. Ce qui va lui permettre dans le cadre de la compétitivité économique et commerciale, d’améliorer les conditions de l’insertion internationale à travers une plus grande rationalisation. Quant aux inconvénients: il y a l’effet Club, qui l’oblige à se conformer aux règles et procédures du Club.
Il y a aussi la réduction du »Policy Space » »Politique satellitaire », en matière de politique économique et de stratégie de développement, notamment en termes d’outils d’appui sectoriel dans le cadre de stratégies industrielles. En troisième lieu, l’intensification de la concurrence pour les producteurs nationaux (concurrence prévisible accrue mais enacdrée et baisse du risque de pratiques déloyales non prévisibles). Je propose, enfin, le lancement d’un débat sur les politiques publiques, inclusif, en associant le Cnese et les autres parties prenantes, qui doivent avoir leur mot à dire sur le sujet.»
Deborah James, directrice des programmes internationaux au Centre de recherche économique et politique et coordinateur du réseau mondial Our world is not for sale (Owifns)
«Mieux vaut l’OMC que l’anarchie.»
ֿ«Je critique l’Omc mais je la préfère à l’anarchie. Sur le terrain, il faut savoir que plus 100 pays sur les 164 adhérents à l’Omc tentent de changer ses régles, et ils n’ont pas eu de chance en 25 ans de tentatives. Il faut le dire crument: les négociations au sein de l’Omc ne sont pas commerciales, mais d’ordre géostratégique. Car, l’Omc payent des consultants d’affaires pour conseiller aux pays en voie de développement pour se conformer à ses idées, qui ne sont pas forcément celles de ces pays conseillées.
L’Omc est, rappelons-le, gérée par des multinationales et les documents d’Apple Google, qui font tout pour bloquer le développement des PME dans les pays émergents.
Ils sont, peut-etre, 500 personnes, qui sont des conseillers en commerce internationale, en dehors du gouvernement, représentant des multinationales, des fédérations, des associations de défense de consommateurs, ce sont ces corporation-là qui forment le poids de l’Omc. Car les régles de l’Omc c’est d’éffacer ce que vous aviez déja. Je termine, sans prétention de dicter aux politiques algériens ce qu’ils doivent faire, de développer leurs pays en termes de digitalisation et d’amélioration des conditions socioéconomiques et de santé, et ce pour ne citer que ces volets.»
Abdelhamid Kerroud, Docteur en relations internationales, professeur-chercheur à l’université Alger 3:
«Nous avons perdu trop de temps.»
«Nous sommes à l’ére de la mondialisation, de l’économie globalisée, et dans l’optique de diversifier ses exportations hors-hydrocarbures, il est temps pour l’Algérie d’adhérer à l’Omc. D’autant que l’Algérie a déja adapté sa législation, il y a une vingtaine d’années, en ratifiant quelques Accords d’associations. L’économie y est, la législation aussi, et la volonté politique d’investir le marché africain et maghrébin; l’Algérie doit, donc, mettre en place les mécanismes d’introduction et d’accession à l’Omc. Il faut savoir aussi que l’Algérie a déja pris part à des dialogues, des rencontres et des négociations d’adhésion à l’Omc, qui, malheureusement, n’ont pu aboutir, car il y avait un manque de suivi direct et correct. Et à chaque fois, c’est le report pour des raisons liées à un changement d’orientation ou complètement à une rupture par rapport au processus d’adhésion. Mais 20 ans après, il faut que ça réussisse! Certes les débuts seront contraignants, mais il ne faut plus perdre du temps, qui sera désavantageux sur le plan économique et par rapport à notre positionnement sur l’échiquier international.»
Z. Z.