Écotimes: Le président Tebboune a ordonné de revoir radicalement la structuration et la politique du transport maritime de marchandises et de soumettre le projet de la nouvelle stratégie de gestion dans un mois. Vos suggestions à cet égard ?
Abderrahmane Hadef: Il est temps, aujourd’hui, de passer à une nouvelle organisation du transport maritime, parce que l’Algérie a besoin d’accompagner son développement économique et aussi son redéploiement à l’international, de moyens logistiques qui lui permettront de se placer sur la scène internationale et d’être compétitive en termes de commerce international. Et là, le transport maritime devient un maillon très important dans cette vision, parce que le projet de transformation économique de l’Algérie est basé sur deux principaux axes, à savoir, la revalorisation des richesses nationales, à travers la transformation localement. Quant au deuxième axe, il concerne son intégration dans la chaine de valeurs internationale (amélioration de son commerce extérieur). Et là, vient la nécessité d’avoir les moyens adéquats qui peuvent devenir des avantages concurrentiels pour l’économie algérienne. A cet effet, le transport maritime doit être repensé pour aller vers le sens de cette nouvelle vision.
La stratégie doit être conçue d’une façon à avoir un transport maritime compétitif. Et de là, il y a la nécessité d’inclure une approche purement économique dans cette stratégie. Et, travailler pour disposer vraiment de compagnies de transport maritime de haut niveau qui peuvent accompagner le commerce extérieur de façon vraiment efficace.
Quand je parle de compagnies de haut niveau, je suggère que cette stratégie doive permettre l’investissement par le privé, peut être aussi par des partenariats public-privé, et, surtout, valoriser toutes les compétences à leur juste valeur, parce que c’est un domaine très technique, c’est un domaine également qui nécessite du savoir-faire à la fois technique et commercial (Networking), de la maitrise du commerce international. Donc c’est tout un secteur à maitriser, dans ses différents domaines d’activité.
La stratégie doit être aussi attractive autant que possible, outre, la nécessité de travailler avec des armateurs étrangers, en partenariat, pour pouvoir disposer du savoir-faire et de réseaux. Donc, il faut être dans une stratégie innovante dans l’organisation du transport maritime d’une manière générale.
Lors de cette réunion du Conseil des ministres, le président de la République, Abdelmadjid Tebboune a ordonné la fusion des sociétés Cnan Med et Cnan Nord en une seule société. Selon vous, avec cette nouvelle restructuration, le pavillon national renaitra-t-il de ses cendres ?
Par rapport à la fusion des deux compagnies, Cnan Med et Cnan Nord en une seule société, je pense qu’il est temps de revoir l’actuelle organisation au niveau de ces deux compagnies qui a démontré toutes ses limites.
Maintenant, nous devons, d’abord, mobiliser les ressources dans une seule compagnie et essayer de l’assainir d’une façon définitive et de la doter des moyens qui lui permettront, de façon temporaire et transitoire, de répondre aux besoins nationaux en matière de transport maritime, en attendant la mise en place de la nouvelle stratégie qui va permettre l’investissement dans le domaine.
Il est temps, aujourd’hui, que cette compagnie soit dotée de vraies compétences et d’une gouvernance qui permette de répondre aux enjeux et aux attentes des professionnels et clients. Mais aussi, parvenir à une gouvernance efficace, performante et transparente. D’ailleurs, cette enquête qui a été ordonnée par le Président Tebboune c’est pour connaitre les dérives qui ont fait que notre pavillon soit désorganisé et non performant, surtout avec tout ce qui se passe au niveau des ports à l’étranger, où des bateaux algériens sont retenus .
Donc, il est très important de mettre la gouvernance qu’il faut afin d’amilorer le rendement. La stratégie doit être basée sur une approche économique (intérêt, profit, rendement). Tout cela doit être inclus dans cette gouvernance.
Le marché maritime mondial, actuellement, est dominé par une dizaine d’armateurs. Quelle stratégie à mettre en place afin de faire face à cette rude concurrence ?
Il faut aller au combat pour être concurrentiel. Je pense que nous sommes concurrentiels sur certaines destinations, sur certaines filiales et produits. Donc, il faut déjà penser à identifier là où on est concurrentiel et travailler dessus. Nous sommes concurrentiels sur l’énergie, la proximité. A titre d’exemple, il est important de se diriger vers l’Afrique parce que, un réseau de transport interconnecté (route, réseau ferroviaire, maritime) peut être une offre pour certains pays du continent africain qui sont enclavés au centre de l’Afrique. L’Algérie dispose des infrastructures qui peuvent être exploitées dans cette optique et devenir concurrentielle avec ces pays là. Je pense qu’il est important d’inclure cette stratégie dans une vision globale du transport en Algérie, surtout, par rapport au transport international et être vraiment dans une optique régionale et ne pas seulement travailler sur le marché algérien.
Entretien réalisé par Akrem R.