Le développement du chemin de fer s’inscrit dans la stratégie globale de la revitalisation du secteur du transport et de l’encadrement infrastructurel de la croissance économique du pays. Le programme en cours, une fois achevé, fera atteindre au réseau ferroviaire national le volume de 6500 km. Les efforts accomplis depuis 2020 ont abouti à l’installation d’un réseau de 4722 km, sachant que, à l’Indépendance, notre pays a hérité d’un linéaire d’environ 3900 km de voie ferrée. À 2023, le réseau atteint un linéaire de 4722 km. Le programme d’investissement du secteur prévoit d’atteindre, d’ici 2030, 15 000 km de réseau de voie ferrée.
Par Amar Naït Messaoud
Jusqu’au début des années 2000, le transport ferroviaire (voyageurs et marchandises) ne « pesait » pas lourd dans le dispositif général du transport en Algérie. L’activité de transport était assurée de façon hégémonique par voie terrestre, provoquant des problèmes immenses de circulation (congestion des routes et des villes, accidents, pollution.).
Certaines lignes héritées de l’administration colonialesur un total de moins de 4000 kmont été abandonnées pour des raisons diverses, à commencer par la baisse de la production et de l’activité de transformation de l’alfa. L’économie de l’alfa a conduit l’administration coloniale à construire les lignes de Saïda et Djelfa.
D’autres lignes de transport de voyageurs ont été aussi abandonnées suite à la montée en puissance du transport terrestre.
La décennie du terrorisme a également joué en défaveur du transport ferroviaire qui avait subi beaucoup de pertes, principalement sur les tronçons du centreouest (Blida, Boumedfaâ, El Affroun, Khemis Miliana).
En 2008, un accident causé par une erreur humaine d’aiguillage a valu à l’un des tunnels des gorges de Lakhdaria une explosion en bonne et due forme, puisque le té- lescopage a eu lieu entre un train de transport de carburant et une locomotive.
La température avait atteint dans le tunnel quelque 1000 degrés Celsius faisant quatre morts (carbonisés) et faisant sauter l’ouvrage d’art en mille morceaux, avec une ouverture complète sur le ciel. La réparation du tunnel a consisté en sa reconstruction totale en béton.
Les réparations, les dédoublements de voies, l’électrification des lignes, l’extension du réseau et les travaux de signalisation ont constitué un grand programme d’investissement dès le milieu des années 2000.
Avec son passif d’une dure histoire partagée par tous les secteurs économiques, la SNTF ne pouvait pas faire face à un tel plan de développement qui lui était tracé par les pouvoirs publics.
Hégémonie du transport par route
Le plan de développement des chemins de fer s’est fondé sur un certain nombre d’observations et de constats objectifs qui font ressortir les retards du transport ferroviaire dans notre pays.
Un seul indice peut illustrer largement ce fait. Le taux de transport de marchandises par voie terrestre (camions, fourgons), tel qu’il ressort du Schéma directeur routier et autoroutier (SDRA), représente 90% de l’ensemble du volume de marchandises transportées.
C’est donc tout naturellement que l’État a mis la « main à la poche » pour redonner vie à un secteur stratégique de l’économie du pays, particulièrement dans cette perspective de diversification des activités qui requerra des infrastructures de transport et la réduction des coûts de cette rubrique des devis des entreprises.
Le budget alloué au développement du rail depuis entre 2005 et 2015, via l’Agence nationale d’études et de suivi de la réalisation des investissements ferroviaires (ANESRIF), est de 2 500 milliards de dinars, soit un équivalent de 32 milliards de dollars. Le gouvernement avait estimé que, malgré programmes d’investissements massifs engagés par État, la SNTF et son organisation sont « dépassés ».
C’est pourquoi, il avait incité, en 2015, les cadres de l’entreprise à trouver les voies et moyens pour que la société renoue avec l’efficacité, et à moderniser le transport ferroviaire des voyageurs et des marchandises.
L’EPIC-SNTF, dont le statut a été modifié pour devenir une Société par action (SPA) dont les actions sont détenues entièrement par l’État, était ainsi appelée à « adopter des méthodes de gestion modernes et mettre en œuvre les plans de développement prévus dans ce secteur par les pouvoirs publics ».
Le plan de développement conçu par le gouvernement prévoit l’extension du réseau ferroviaire à un linéaire de 15 000 km d’ici 2030, connectés aux infrastructures portuaires, aéroportuaires et logistiques..
710 km de réseau ont été réceptionnés en 2023
En 2023, un réseau fonctionnel de 710 km a été livré. Y figure la ligne Boughezoul-Laghouta, en passant par Djelfa, sur une distance de 250 km.
La vitesse que peut développer le train sur ce tronçon est de 220 km/h. au croisement de cette voie Nord-Sud, au niveau de Boughezoul, vient la ligne Tissemsilt-Msila (EstOuest) sur 290 km, avec une vitesse de 160 km/h.
Ces deux lignes en croisement font de Boughezoul, ville relevant de la wilaya de Médéa, une place, un hub stratégique, reprenant l’idée de l’ancien projet des années 70’ de faire de cette ville une deuxième capitale du pays. La ville nouvelle de Boughezoul est en pleine réalisation.
Le nœud ferroviaire qui vient d’être installé à ce niveau-là constitue une infrastructure de desserte de haute importance pour l’économie nationale, d’autant plus que les deux voies marchent en parallèle avec les deux grandes routes (RN1 et RN40), appelées à devenir des autoroutes (la première, la Transsaharienne, la seconde, l’autoroute des Hauts Plateaux).
Un autre projet de voie ferré va se connecter à la ligne BoughezoulMsila ; c’est celui de Bouira-Aïn Lahdjal qui passe par la nouvelle zone industrielle de Lachouaf (900 ha), dans la commune de Dirah qui est actuellement en état d’aménagement.
Parmi les ouvrages réceptionnés aussi au cours de l’année 2023, celui de la ligne Saïda-Frenda sur une distance de 120 km.
Le tronçon est prévu pour des trains pouvant développer une vitesse maximale de 160 km/h. Au cours de la même année, la ligne desservant le complexe sidérurgique de Bellara (dans la région de l’Oued El Kebir, dans la wilaya de Jijel) à partir du port de Djendjen, sur une distance de 50 km a été également livrée.
Parmi les projets de chemin de fer qui vont marquer profondément la géographie et l’économie du pays, il y a cette ligné ligne Bechar-Tindouf-Gara Djebilet, sur une distance de 950 km dont les travaux sont déjà lancés.
Cette ligne, destinée au transport du minerai de fer de Gara Djebilet, au sud de Tindouf, constituera une veine de l’économie nationale. Autour de cette méga-infrastructure, se grefferont d’autres activités (commerciales, agricoles, de services).
A. N. M.